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Assassinat de Rosa Luxemburg. Ne pas oublier!

Le 15 janvier 1919, Rosa Luxemburg a été assassinée. Elle venait de sortir de prison après presque quatre ans de détention dont une grande partie sans jugement parce que l'on savait à quel point son engagement contre la guerre et pour une action et une réflexion révolutionnaires était réel. Elle participait à la révolution spartakiste pour laquelle elle avait publié certains de ses textes les plus lucides et les plus forts. Elle gênait les sociaux-démocrates qui avaient pris le pouvoir après avoir trahi la classe ouvrière, chair à canon d'une guerre impérialiste qu'ils avaient soutenue après avoir prétendu pendant des décennies la combattre. Elle gênait les capitalistes dont elle dénonçait sans relâche l'exploitation et dont elle s'était attachée à démontrer comment leur exploitation fonctionnait. Elle gênait ceux qui étaient prêts à tous les arrangements réformistes et ceux qui craignaient son inlassable combat pour développer une prise de conscience des prolétaires.

Comme elle, d'autres militants furent assassinés, comme Karl Liebknecht et son ami et camarade de toujours Leo Jogiches. Comme eux, la révolution fut assassinée en Allemagne.

Que serait devenu le monde sans ces assassinats, sans cet écrasement de la révolution. Le fascisme aurait-il pu se dévélopper aussi facilement?

Une chose est sûr cependant, l'assassinat de Rosa Luxemburg n'est pas un acte isolé, spontané de troupes militaires comme cela est souvent présenté. Les assassinats ont été systématiquement planifiés et ils font partie, comme la guerre menée à la révolution, d'une volonté d'éliminer des penseurs révolutionnaires, conscients et déterminés, mettant en accord leurs idées et leurs actes, la théorie et la pratique, pour un but final, jamais oublié: la révolution.

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Avec Rosa Luxemburg.

1910.jpgPourquoi un blog "Comprendre avec Rosa Luxemburg"? Pourquoi Rosa Luxemburg  peut-elle aujourd'hui encore accompagner nos réflexions et nos luttes? Deux dates. 1893, elle a 23 ans et déjà, elle crée avec des camarades en exil un parti social-démocrate polonais, dont l'objet est de lutter contre le nationalisme alors même que le territoire polonais était partagé entre les trois empires, allemand, austro-hongrois et russe. Déjà, elle abordait la question nationale sur des bases marxistes, privilégiant la lutte de classes face à la lutte nationale. 1914, alors que l'ensemble du mouvement ouvrier s'associe à la boucherie du premier conflit mondial, elle sera des rares responsables politiques qui s'opposeront à la guerre en restant ferme sur les notions de classe. Ainsi, Rosa Luxemburg, c'est toute une vie fondée sur cette compréhension communiste, marxiste qui lui permettra d'éviter tous les pièges dans lesquels tant d'autres tomberont. C'est en cela qu'elle est et qu'elle reste l'un des principaux penseurs et qu'elle peut aujourd'hui nous accompagner dans nos analyses et nos combats.
 
Voir aussi : http://comprendreavecrosaluxemburg2.wp-hebergement.fr/
 
4 juillet 2021 7 04 /07 /juillet /2021 18:14
Les assassinats de Rosa Luxemburg et de la Commune - Les semaineS sanglanteS - "Ces classes possédantes crient depuis toujours à la violence et à la terreur … des esclaves"
"Les classes possédantes, qui, en mille ans d’histoire, à la moindre rébellion de leurs esclaves, n’ont reculé, devant aucun acte de violence et aucune infamie afin de protéger ce qui constitue le garant de “l’Ordre”: la propriété privée et la domination de classe, ces classes possédantes crient depuis toujours à la violence et à la terreur … des esclaves". Rosa Luxemburg  "Un jeu dangereux" - Die Rote Fahne 24 novembre 1918

En hommage à la Commune en cette semaine sanglante.

NE PAS OUBLIER.

Les massacres et les assassinats sont la réaction de la bourgeoisie à toutes les tentatives révolutionnaires dans l'histoire comme aujourd'hui. Et quand cela ne suffit plus, il reste toujours à la bourgeoisie le recours au fascisme. DVP

Les assassinats de Rosa Luxemburg et de la Commune - Les semaineS sanglanteS - "Ces classes possédantes crient depuis toujours à la violence et à la terreur … des esclaves"

Les parallèles entre mai 1871 et janvier 1919 sont innombrables. En novembre 1918, dans un article "Un jeu dangereux", Rosa Luxemburg dénonce les menées de la social-démocratie, de la réaction et des corps francs réunis qui accusent les révolutionnaires socialistes de préparer un coup d’État, de menées subversives Leur but : préparer les esprits à l'assassinat de la révolution.

 

Pour cela, Rosa Luxemburg s'appuie entre autres sur l'expérience de  la Commune et la dénonciation par les classes possédantes de l'époque de ses "atrocités" et de la "violence":

"Qui n’est pas écœuré d’entendre les gardiens du Capitole de l’anarchie bourgeoise, ceux là-même qui ont transformé en quatre ans l’Europe en un champ de ruines, crier à «l’anarchie» de la dictature des prolétaires! … Les classes possédantes, qui, en mille ans d’histoire, à la moindre rébellion de leurs esclaves, n’ont reculé, devant aucun acte de violence et aucune infamie afin de protéger ce qui constitue le garant de “l’Ordre”: la propriété privée et la domination de classe, ces classes possédantes crient depuis toujours à la violence et à la terreur … des esclaves. Les Thiers et Cavaignac qui avaient assassiné des dizaines de milliers de prolétaires parisiens, hommes, femmes et enfants, lors du massacre de juin 1848, ont ensuite submergé le monde de leurs gémissements à propos des prétendues 'atrocités' de la Commune de Paris. …"

 
Elle dénonce leur jeu qui se vérifiera lors de la semaine sanglante de mi-janvier à Berlin :

"Mais il y a en a d'autres, qui ont un besoin pressant de faire régner aujourd’hui le terrorisme, le règne de la terreur, l’anarchie, ce sont ces Messieurs les Bourgeois, ce sont tous les parasites de l’économie capitaliste, qui tremblent pour leurs biens et leurs privilèges, leurs profits et leurs pouvoirs. Ce sont eux qui mettent sur le dos du prolétariat socialiste des menées anarchistes fictives, des prétendus projets de putsch, afin de faire déclencher au moment opportun par leurs agents, de véritables coups d’État, une réelle anarchie, pour étrangler la révolution prolétarienne, pour faire sombrer dans le chaos la dictature socialiste et ériger pour toujours sur les ruines de la révolution la dictature de classe du capital."

 

Peu après cet article, la ville se couvrait d'affichettes appelant à l'assassinat des "leaders" spartakistes. Et Rosa Luxemburg, Karl Liebknecht, faits prisonnierE, et trois mois plus tard Leo Jogiches, seront assassinéEs.

La seule réponse de la bourgeoisie à l'aspiration à une autre monde - lors de la Commune comme lors de la révolution allemande - sont toujours hier comme aujourd'hui : les massacres et les assassinats.

Les assassinats de Rosa Luxemburg et de la Commune - Les semaineS sanglanteS - "Ces classes possédantes crient depuis toujours à la violence et à la terreur … des esclaves"
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5 mars 2021 5 05 /03 /mars /2021 14:07
Parler - enseigner - lutter - réfléchir - écrire
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Révolutionnaire

Après d'innombrables années de fréquentation quotidienne avec la pensée, l'action, la vie de Rosa Luxemburg, s'il me fallait retenir un terme pour la définir, je dirais : révolutionnaire. Dépassant toutes les divisions, elle aura mis au centre de sa pensée, de son action, tout ce qui unit les opprimés pour mener un combat commun. Rejetant le nationalisme, le militarisme, le colonialisme, elle sera de celles et ceux peu nombreux qui combattront la boucherie de 1914. Sa lutte contre le réformisme politique est le rejet de toute décision qui pourrait mettre en danger la réalisation de ce but final. Sa pensée s'appuie sur une approche marxiste. Et ce qui est certainement le plus précieux de son héritage politique et sensible, c'est sa volonté constante d'aider à éclairer le prolétariat dans ses luttes : dans les centaines d'articles et meetings, ses interventions aux Congrès du parti et de l'Internationale, elle n'aura comme volonté que d'accompagner le prolétariat dans sa prise de conscience. Elle sera attentive à tous les mouvements, même les plus surprenants. Dans sa vie, elle paiera le prix de cette action :de la prison jusqu'à son assassinat. D.V.P.

Nous préparons pour ce double 150e anniversaire de la naissance de Rosa Luxemburg et de la Commune, avec Sabrina Lorre, comédienne qui avait initié et animé une formidable quinzaine Rosa Luxemburg à Saint-Etienne un travail et une lecture des textes de Rosa Luxemburg sur la Commune que nous tenons à disposition de celles et ceux qui voudraient organiser par Internet ou ailleurs des événements.

En ce jour anniversaire de la naissance de Rosa Luxemburg, ne pas oublier.

Assassinat de Rosa Luxemburg. Ne pas oublier!

Le 15 janvier 1919, Rosa Luxemburg a été assassinée. Elle venait de sortir de prison après presque quatre ans de détention dont une grande partie sans jugement parce que l'on savait à quel point son engagement contre la guerre et pour une action et une réflexion révolutionnaires était réel. Elle participait à la révolution en Allemagne pour laquelle elle avait publié certains de ses textes les plus lucides et les plus forts. Elle gênait les sociaux-démocrates qui avaient pris le pouvoir après avoir trahi la classe ouvrière, chair à canon d'une guerre impérialiste qu'ils avaient soutenue après avoir prétendu pendant des décennies la combattre. Elle gênait les capitalistes dont elle dénonçait sans relâche l'exploitation et dont elle s'était attachée à démontrer comment leur exploitation fonctionnait. Elle gênait ceux qui étaient prêts à tous les arrangements réformistes et ceux qui craignaient son inlassable combat pour développer une prise de conscience des prolétaires. Comme elle, d'autres militants furent assassinés, comme Karl Liebknecht et son ami et camarade de toujours Leo Jogiches. Comme eux, la révolution fut assassinée en Allemagne. Que serait devenu le monde sans ces assassinats, sans cet écrasement de la révolution. Le fascisme aurait-il pu se dévélopper aussi facilement? Une chose est sûr cependant, l'assassinat de Rosa Luxemburg n'est pas un acte isolé, spontané de troupes militaires comme cela est souvent présenté. Les assassinats ont été systématiquement planifiés et ils font partie, comme la guerre menée à la révolution, d'une volonté d'éliminer des penseurs révolutionnaires, conscients et déterminés, mettant en accord leurs idées et leurs actes, la théorie et la pratique, pour un but final, jamais oublié: la révolution. Dominique Villaeys-Poirré

Sa plus belle description de la lutte politique :

Grève de masse. Rosa Luxemburg

La grève de masse telle que nous la montre la révolution russe est un phénomène si mouvant qu'il reflète en lui toutes les phases de la lutte politique et économique, tous les stades et tous les moments de la révolution. Son champ d'application, sa force d'action, les facteurs de son déclenchement, se transforment continuellement. Elle ouvre soudain à la révolution de vastes perspectives nouvelles au moment où celle-ci semblait engagée dans une impasse. Et elle refuse de fonctionner au moment où l'on croit pouvoir compter sur elle en toute sécurité. Tantôt la vague du mouvement envahit tout l'Empire, tantôt elle se divise en un réseau infini de minces ruisseaux; tantôt elle jaillit du sol comme une source vive, tantôt elle se perd dans la terre. Grèves économiques et politiques, grèves de masse et grèves partielles, grèves de démonstration ou de combat, grèves générales touchant des secteurs particuliers ou des villes entières, luttes revendicatives pacifiques ou batailles de rue, combats de barricades - toutes ces formes de lutte se croisent ou se côtoient, se traversent ou débordent l'une sur l'autre c'est un océan de phénomènes éternellement nouveaux et fluctuants. Et la loi du mouvement de ces phénomènes apparaît clairement elle ne réside pas dans la grève de masse elle-même, dans ses particularités techniques, mais dans le rapport des forces politiques et sociales de la révolution. La grève de masse est simplement la forme prise par la lutte révolutionnaire et tout décalage dans le rapport des forces aux prises, dans le développement du Parti et la division des classes, dans la position de la contre-révolution, tout cela influe immédiatement sur l'action de la grève par mille chemins invisibles et incontrôlables. Cependant l'action de la grève elle-même ne s'arrête pratiquement pas un seul instant. Elle ne fait que revêtir d'autres formes, que modifier son extension, ses effets. Elle est la pulsation vivante de la révolution et en même temps son moteur le plus puissant. En un mot la grève de masse, comme la révolution russe nous en offre le modèle, n'est pas un moyen ingénieux inventé pour renforcer l'effet de la lutte prolétarienne, mais elle est le mouvement même de la masse prolétarienne, la force de manifestation de la lutte prolétarienne au cours de la révolution. A partir de là on peut déduire quelques points de vue généraux qui permettront de juger le problème de la grève de masse..."

Sur la Commune et les révolutions

« … Dans la nuit des misères que font naître les crises du capitalisme, des fantômes s’élèvent, annonçant l’inexorable destin, qui déjà se pouvait prévoir à l’aurore même de l’ère capitaliste. La lutte de classes, génératrice de ces crises qui déchire la société bourgeoise et qui, fatalement, causera sa perte, fait comme une trainée rouge à travers toute l’histoire d’un siècle. Elle se dessinait confusément dans la grande tourmente de la Révolution française. Elle s’inscrivait en lettres noires sur la bannière des canuts de Lyon, les révoltés de la faim qui, en 1834, jetèrent le cri : « Vivre en travaillant ou mourir en combattant ! » » Elle alimentait le feu rouge des torches allumées par les chartistes anglais de 1830 et de 1840. Elle se levait comme une colonne de flammes du terrible massacre de juin 1848 à Paris. Elle jetait son éclat de pourpre dans la capitale de la France, sur le mouvement de 1871, lorsque la canaille bourgeoise victorieuse se vengeait sur les héros de la Commune par le fer meurtrier des mitrailleuses. … » 1er mai 1909

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18 août 2020 2 18 /08 /août /2020 19:58

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Die Ausgangslage

Die politische Situation im Deutschen Reich im Winter 1918/19 war hochgradig angespannt, die verschiedenen politischen Lager standen sich unversöhnlich und gewaltbereit gegenüber.

Am 9. November hatte vor dem Hintergrund revolutionärer Unruhen, einem von der SPD aufgerufenen Generalstreik und bei laufenden Verhandlungen über Waffenstillstand und Kapitulation der letzte vom Kaiser eingesetzte Reichskanzler Prinz Max von Baden dem Vorsitzenden der SPD und Reichstagsabgeordneten Friedrich Ebert die Regierungsgewalt übergeben. Kurz darauf am selben Tag hatte dessen Parteifreund Philipp Scheidemann die „deutsche Republik“ ausgerufen, dem wenig später der Führer des Spartakusbundes Karl Liebknecht mit der Ausrufung einer „sozialistischen Republik“ folgte.

Ebert bildete am 10. November eine paritätisch aus Abgeordneten der SPD und der USPD besetzte Regierung – den „Rat der Volksbeauftragten“. In Anbetracht möglicher revolutionärer Umstürze und in Ermangelung besserer Alternativen wurde diese Reichsregierung auch von konservativen Kräften, insbesondere der Armee und der Verwaltung anerkannt. Unter Beteiligung des „Allgemeinen Reichskongresses deutscher Arbeiter- und Soldatenräte“ wurde am 19. Dezember beschlossen, am 19. Januar eine Nationalversammlung wählen zu lassen, um aus dieser eine reguläre Reichsregierung hervorgehen lassen zu können. Zwischenzeitlich hatten im Oktober und November der Kaiser und alle deutschen Fürsten abgedankt.

Während nun auf der einen Seite die SPD unter Ebert um eine konstruktive Zusammenarbeit mit Militär und Verwaltung bemüht war, ungeachtet der Tatsache, dass diese Partner die Republik und demokratische Prozesse ablehnten, strebte die USPD, aber vor allem die Ende Dezember gegründete KPD den revolutionären Umsturz nach sowjetischem Vorbild an. Meinungsführer auf dieser Seite waren Rosa Luxemburg und Karl Liebknecht. Beide wurden damit nicht nur zum Gegner der konservativen Kräfte, sondern auch in weiten Teilen der SPD, insbesondere in deren Führung, als Bedrohung und politischer Hauptgegner gesehen.

Kurz vor Weihnachten kam es in Berlin zur Konfrontation. Die aus Marinesoldaten gebildete Volksmarinedivision hatte sich im Stadtschloss festgesetzt und beharrte auf der Auszahlung ausstehenden Soldes, während die Regierung die Auflösung des zunehmend als unzuverlässig wahrgenommenen Verbandes, der durch andere revolutionär eingestellte Formationen unterstützt wurde, durchsetzen wollte. Eine gewaltsame Räumung des Stadtschlosses durch zurückgekehrte Frontverbände an Weihnachten scheiterte.

Nach dieser gewaltsamen Auseinandersetzung zwischen SPD-geführter Regierung und konservativ-monarchistisch eingestelltem Militär auf der einen Seite und revolutionär eingestellten Freiwilligenverbänden und bewaffneten Arbeitern auf der anderen Seite, die zu zahlreichen Toten, auch unter Zivilisten, geführt hatte, verließen die USPD-Abgeordneten den Rat der Volksbeauftragten. Ihre Plätze wurden zum Teil von SPD-Abgeordneten eingenommen – unter anderem von Gustav Noske, der die Zuständigkeit für Heeres- und Marineangelegenheiten übernahm und noch 1919 erster Reichswehrminister wurde.

Die am 4. Januar erfolgte Entlassung des von der USPD gestellten Berliner Polizeipräsidenten Emil Eichhorn führte zu einer Großdemonstration am 5. Januar, zu der unter anderem auch die USPD aufgerufen hatte. Diese wuchs sich sehr schnell immer weiter aus und führte zur Besetzung von Druckereien und Verlagsgebäuden. Der sich nun bildende und aus Vertretern von USPD, KPD und den „Revolutionären Obleuten“ bildende „Revolutionsausschuss“ rief für den 7. Januar zum Generalstreik und zum Sturz der Regierung auf. Aus der großen Menge der Demonstranten gingen jedoch keine gewaltsamen Aktionen hervor. Der Revolutionsausschuss konnte sich in der Folge auf kein weiteres Vorgehen einigen. Karl Liebknecht, Mitglied des Parteivorstands der KPD, rief zum bewaffneten Kampf gegen die Regierung auf – Rosa Luxemburg, wie Liebknecht führendes Mitglied des Spartakusbundes und der KPD, riet hiervon ab. Verhandlungen zwischen der Regierung und dem Revolutionsausschuss scheiterten am 7. Januar. Am selben Tag übertrug Ebert Noske die Befehlsgewalt über alle der Regierung unterstehenden militärischen Formationen im Raum Berlin. Die Auseinandersetzung zwischen SPD-geführter Regierung unter Einsatz des Militärs und USPD, KPD und dem in dieser aufgegangenen Spartakusbund, wurde auf beiden Seiten auch sprachlich immer unversöhnlicher. Die Regierung sprach auf Flugblättern von der bevorstehenden „Stunde der Abrechnung“, die revolutionäre Seite drohte auf ihren Flugblättern den Regierungsmitgliedern mit dem „Schafott“ und sprach von „Todfeinden“. Während die Masse der Streikenden wohl gegen die Regierung demonstrieren, aber nicht in gewaltsame Kämpfe eintreten wollte, trat das Militär am 10. Januar zum Angriff über. Am 10. Januar wurde das Hauptquartier des Spartakusbundes besetzt, am 11. Januar begann die Rückeroberung der Verlagsgebäude, die bereits am nächsten Tag beendet war, da sich die meisten Aufständischen ergaben. Trotz dieses schnellen und ungefährdeten militärischen Erfolges kam es in der Folge zu zahlreichen Erschießungen von Gefangenen durch die militärischen Einheiten der Regierung.

In dieser Situation zogen am 13. Januar weitere militärische Verbände, Freikorps, in die Stadt ein – an der Spitze die Garde-Kavallerie-Schützen-Division (bald darauf erweitert zum Garde-Kavallerie-Schützen-Korps). Es folgten weitere Gewalttaten durch diese Verbände, die durchweg gegen Republik, Demokratie und natürlich vor allem gegen jegliche revolutionäre Organisation eingestellt waren – in letzterer ihren Hauptfeind sahen.

Die Ermordung

Bereits seit Dezember wurden von der „Antibolschewistischen Liga“ Flugblätter und Plakate veröffentlicht, in denen zur Ergreifung der Anführer des revolutionären Aufstandes aufgerufen wurde und insbesondere Karl Liebknecht und Rosa Luxemburg als Führende und Verantwortliche benannt wurden. Es wurde darin ausdrücklich auch dazu aufgerufen, die Führer des Spartakusbundes zu töten. Auch die Regierung suchte die nach dem gescheiterten Aufstand untergetauchten KPD- und Spartakusbundführer. Am 15. Januar wurden Karl Liebknecht und Rosa Luxemburg von der Wilmersdorfer Bürgerwehr, aufgrund eines entsprechenden Hinweises oder durch Telefonüberwachung, entdeckt und verhaftet. Beide wurden in das Hauptquartier der Garde-Kavallerie-Schützen-Division, der die Wilmersdorfer Bürgerwehr unterstand, im Eden-Hotel verbracht. Befehlshaber dieser Division war Generalleutnant Heinrich von Hofmann. Da dieser gesundheitlich stark eingeschränkt war, lag die Führung der Division faktisch beim ersten Generalstabsoffizier Hauptmann Waldemar Pabst.

Pabst ließ Karl Liebknecht und Rosa Luxemburg über mehrere Stunden verhören. Offenbar wurde von ihm die Reichsregierung frühzeitig über die Verhaftung der beiden informiert. Pabst hat später mehrfach deutlich gemacht, dass er ganz bewusst entschieden habe, Liebknecht und Luxemburg töten zu lassen. Er begriff dies bis zu seinem Lebensende nicht als Mord (der es ganz unzweifelhaft war), sondern als Hinrichtung im nationalen Interesse. Pabst hat jedoch ab 1969 auch mehrfach deutlich betont, dass diese Ermordung mit der SPD-Führung in Person von Noske und vermutlich auch Ebert abgesprochen war.

Die Anwesenheit von Liebknecht und Luxemburg im Eden-Hotel war schnell bekannt geworden. Für die Durchführung des Mordes mussten daher beide das Haus verlassen. Zunächst wurden von Pabst im Offizierkorps der Division Freiwillige für die Durchführung gesucht und gefunden. Liebknecht verließ als erster unter Bewachung das Hotel. Auf dem Weg zu einem bereitstehenden Wagen wurde er von einem Soldaten durch einen Kolbenschlag verletzt. Der Wagen mit dem verletzten Liebknecht und mehreren begleitenden Offizieren verließ das Hotel. Auf der Fahrt wurde eine Panne vorgetäuscht, Liebknecht zum Aussteigen aufgefordert und daraufhin durch Schüsse in den Rücken getötet. Der Leichnam wurde als unbekannte Leiche bei einer Rettungsstelle abgegeben. Die spätere offizielle Lesart für diesen Mord war „auf der Flucht erschossen“.

Rosa Luxemburg wurde mehrere Stunden später ebenfalls aus dem Hotel zum Wagen verbracht, und erhielt ebenfalls vom selben Soldaten mehrere Kolbenschläge und wurde dadurch schwer verletzt. Nach Losfahren des Wagens wurde die bereits bewusstlose Luxemburg durch einen aufgesetzten Pistolenschuss in den Kopf getötet. Um die Frage, wer diesen Schuss abgegeben hat, entspannen sich jahrzehntelange Diskussionen und Rechtsstreite. Die Tote wurde schließlich in den Landwehrkanal geworfen. Die offizielle Lesart für diesen Mord war „beim Verlassen des Hotels von einer aufgebrachten Menschenmenge getötet“. Die Leiche sei später von einer „Menschenmenge“ entwendet worden.

Als Mörder von Karl Liebknecht anzusehen sind die Offiziere Horst von Pflugk-Harttung, Heinrich Stiege, Ulrich von Ritgen und Rudolf Liepmann. Darüber hinaus beteiligt waren die Offiziere Heinz von Pflugk-Harttung, Bruno Schulze und der Soldat Clemens Friedrich.

Als Mörder von Rosa Luxemburg galt jahrzehntelang Kurt Vogel, mittlerweile gilt jedoch die Täterschaft von Hermann Souchon als erwiesen. Beide Offiziere waren allerdings unmittelbar tatbeteiligt. Der Soldat, der in beiden Fällen noch vor Abfahrt des Wagens mit seinem Gewehrkolben auf die Gefangenen einschlug, war Otto Runge.

Der Prozess

Sofort nach der Tat bemühten sich Freunde und Weggefährten der Ermordeten um die Aufklärung des Geschehens. Pabst betonte später, ihm sei von Noske zugesichert worden, dass es zu keiner gerichtlichen Aufarbeitung kommen würde. Aufgrund des großen öffentlichen Drucks war jedoch zumindest ein militärgerichtliches Verfahren unumgänglich.

Aus diesem Grund kam es zur bizarren Situation, dass das Gericht des Garde-Kavallerie-Schützen-Korps eine Untersuchung und anschließend einen Prozess führen musste „in der Strafsache gegen den Husaren Otto Runge und Genossen wegen Ermordung von Dr. Karl Liebknecht und Rosa Luxemburg“. Der erste (nicht eingeweihte) Richter der Division Kurtzig war offenbar ab dem 16. Januar bereits tatsächlich um Aufklärung des Geschehens bemüht und wurde schnell von der Untersuchung abgezogen. Unter der Leitung des Kriegsgerichtsrates Paul Jorns wurden die Untersuchungen weitergeführt. Während Jorns ersichtlich bemüht war, die Untersuchungen so zu führen, dass keine Anklage möglich wurde und die noch von Kurtzig verhafteten „Transportführer“ für den Abtransport von Liebknecht und Luxemburg (Pflugk-Harttung und Vogel) wieder freiließ und den des Mordversuchs verdächtigen Runge nicht finden konnte, wurde durch Leo Jogiches, einem weiteren ehemaligen Spartakusbundführer und mittlerweile Vorsitzenden der KPD (der im März verhaftet und in der Haft ermordet wurde), am 12. Februar in der Zeitschrift „Rote Fahne“ ein sehr detailliertes Tatgeschehen mit Nennung der Namen der tatverdächtigten Offiziere veröffentlicht. Nun musste selbst Jorns tätig werden. Am 8. Mai wurde der Prozess unter dem vorsitzenden Richter Kriegsgerichtsrat Ehrhardt förmlich eröffnet. Nur unter erheblichem und durchaus kreativem Aufwand gelang es dem Ankläger Jorns, sich in seinem Strafantrag beschränken zu können und so auf eine Verurteilung zu geringen Haftstrafen für Vogel und Runge und Freispruch aller anderen Tatverdächtigen hinzuwirken. Vogel wurde später sogar von dem im Prozess als Beisitzendem beteiligten Wilhelm Canaris, dem späteren Admiral und Chef des Amtes Ausland/Abwehr, von der SS als Mitwisser des 20. Juli ermordet, aus dem Gefängnis befreit.

Am 25. Januar wurde Karl Liebknecht beerdigt. Da die Leiche von Rosa Luxemburg noch nicht gefunden war, wurde für sie ein leerer Sarg bestattet. Die Beerdigung geriet zu einer gewaltigen politischen Demonstration in Berlin, begleitet von Unruhen in ganz Deutschland.

Am 31. Mai wurde die Leiche Luxemburgs aus dem Landwehrkanal geborgen. Auf Anweisung Noskes wurde der Leichnam dem Militär übergeben und in das Lazarett des Truppenübungsplatzes in Zossen überführt. Durch die Freundin und ehemalige Sekretärin Luxemburgs Mathilde Jacob wurde die Tote in Zossen identifiziert. Am 3. Juni erfolgte die Obduktion (wie auch zuvor der Leichnam Liebknechts obduziert worden war), deren Ergebnisse noch in die laufende Hauptverhandlung aufgenommen wurde. Bis zur Bestätigung von Jorns Urteil durch Noske verging einige Zeit, zumal der flüchtige Vogel weiter vernommen werden sollte. Der wiederum hielt sich ungefährdet im Ausland auf, eine Auslieferung wurde von der Reichsregierung nicht ernsthaft angestrebt. Letztlich erfolgte die Bestätigung des Urteils durch Noske vermutlich auch, um das Verfahren formal ordnungsgemäß abzuschließen und die bei einer Fortführung und intensiver Befragung Vogels, womöglich auch Pabsts, mögliche Aufdeckung für die Reichsregierung, insbesondere Noske, peinlicher Details zu vermeiden.

Noch vor 50 Jahren, 1969, sorgte der Mord für öffentliche Aufregung, nachdem in einem Fernsehspiel ausgehend von Aussagen Pabsts Souchon als Mörder Luxemburgs bezeichnet wurde. Auf entsprechende Klage Souchons hin wurden der Filmemacher und der Sender gerichtlich verurteilt, dies öffentlich zu widerrufen und diese Behauptung künftig zu unterlassen. Die Auffassung Pabsts, er habe keinen Mord befohlen, sondern eine „patriotische Tat“ für die man ihm und seinen Männern dankbar sein müsse, war zu diesem Zeitpunkt in weiten Kreisen nach wie vor in keiner Weise anstößig.

Quellenlage

Im Bundesarchiv liegen in verschiedenen Beständen Unterlagen zur Ermordung von Rosa Luxemburg und Karl Liebknecht vor, so u.a. im Bestand Reichskanzlei (R 43 I/2676 und 2676a - g) und im Bestand N 1664 Nachlass Hermann Wäger (N 1664/3 und N 1664/4).

In den Beständen der Abt. Militärarchiv des Bundesarchivs sind insbesondere vorhanden:

1. die Prozess- und Untersuchungsakten des Gerichts des Garde-Kavallerie-Schützen-Korps (Bestand PH 8-V). Diese Unterlagen sind vollständig digitalisiert.

2. der Nachlass von Hauptmann Waldemar Pabst (Bestand N 620). Der Nachlass ist in Teilen digitalisiert.

Außerdem liegen im Bundesarchiv unter den Signaturen NY 4001 und NY 4002 Nachlässe bzw. Nachlass-Sammlungen zu Rosa Luxemburg und Karl Liebknecht vor.

Thomas Menzel

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30 avril 2020 4 30 /04 /avril /2020 15:44
Impérialisme et capitalisme – Actualité de l’Accumulation du capital de Rosa Luxemburg (Publié aux Editions Agone)
 L’Accumulation du capital, Contribution à l’explication économique de l’impérialisme
 
Agone/Smolny - Préface de Guillaume Fondu et Ulysse Lojkine - Postface de Mylène Gaulard et Loren Goldner - Traduction de l’allemand par Irène Petit et Marcel Ollivier, entièrement revue par Marie Boudoussier
 

« Le capitalisme tend à se répandre sur le globe et à détruire toutes les autres formes économiques, n’en supportant aucune à côté de lui. Et pourtant il est en même temps la première forme économique incapable de subsister seule, à l’aide de son seul milieu. Ayant tendance à devenir une forme mondiale, il se brise à sa propre incapacité d’être cette forme mondiale. Il offre l’exemple d’une contradiction historique qui, à un certain degré de développement, ne peut être résolue que par l’application des principes du socialisme, c’est-à-dire par une forme économique qui est par définition une forme mondiale harmonieuse, fondée sur la satisfaction des besoins de l’humanité travailleuse. »

Ouvrage majeur de Rosa Luxemburg, écrit en 1913, L’Accumulation du capital est le premier texte de l’économie politique marxiste à formuler une théorie d’ensemble de l’impérialisme. En montrant la nécessité inscrite au coeur du mode de production capitaliste de s’étendre à l’échelle du monde en asservissant des territoires non capitalistes et leurs populations, il éclaire les mécanismes qui allaient bientôt déclencher la grande guerre pour le repartage du monde.

Parution : 22/11/2019 - ISBN : 9782748903720 - Format papier : 768 pages - 28.00 € - Format numérique 21.99 €

Impérialisme et capitalisme

 

https://rednotes.noblogs.org/post/2020/05/07/imperialisme-et-capitalisme-actualite-de-laccumulation-du-capital-de-rosa-luxemburg/

 

Actualité de l’Accumulation du capital de Rosa Luxemburg

De la rengaine, elle est devenue un fétiche, dont on ne sait plus bien que faire depuis la fin de l’ère des indépendances. La lutte contre l’impérialisme remporte un certain consensus alors qu’elle hisse au rang de « nations socialistes » dictatures et capitalismes d’État. Elle gangrène la lutte anti-capitaliste en véhiculant de profondes méprises sur les liens structurels unissant le capitalisme à son expansion. Nous l’abandonnerions si à son fondement il n’y avait pas une profonde perspicacité à mettre en avant la barbarie permanente d’un processus d’accumulation capitaliste qui a un besoin structurel de la guerre, de l’expropriation et de l’invasion de toutes les formations sociales qui lui sont extérieures.

Mais un jour viendra où un autre volcan fera entendre sa voix tonitruante, un volcan qui bouillonne déjà sans qu’ils n’y prennent garde, et qui balayera toute cette civilisation de tartuffes aux mains ensanglantées. Martinique, 1902.

Sous sa forme militaire ou humanitaire, Rosa Luxemburg avait déjà très tôt acquis une solide réputation par sa condamnation des politiques impérialistes, militaristes et des nationalismes. Mais bien loin de se contenter de leur condamnation « morale », à un moment où même dans son parti les critiques du colonialisme ne sont pas vraiment partagées1, Rosa Luxemburg va offrir une tentative de compréhension globale de ces phénomènes dans leurs liens structurels aux dynamiques et aux contradictions du capitalisme. Ceci permettra enfin de balayer une fois pour toute l’illusion selon laquelle certains Etats sont impérialistes et d’autres ne le sont pas.

Paru en 1913, L’Accumulation du capital est à de nombreux égards le premier ouvrage de critique de l’économie politique qui poursuit, en la critiquant, l’entreprise de Marx, au moins parce qu’elle lui soumet des objections inhérentes qu’un faisceau de faits économiques et politiques nouveaux. Nous ne trouvons pas dans les écrits marxistes qui font suite au Capital, d’autres contributions aussi sérieuses qui se débattent avec les thèses les plus abouties du champ de recherche ouvert par Marx dans les livres II et III du Capital ainsi qu’avec le réel lui-même. Seuls Tougan Baranowski, qui avait fourni une interprétation des crises du capitalisme comme provenant de déséquilibres (résorbables) entre branches, et Rudolf Hilferding comme provenant d’une crise de la surproduction, proposaient des tentatives abouties au projet marxien2. Ces deux auteurs accompagnés de leurs porte-paroles constituent l’arrière-plan théorique immédiat dans lequel intervient Rosa Luxemburg. Mais les coordonnées du débat n’apparaissent pas avoir fondamentalement changé. Comment cela se fait-il ?

C’est assez étrangement (mais pas tant, la question coloniale scinde le parti) au sein même de son parti qu’une campagne vigoureuse est lancée contre sa contribution, sur un terrain non pas théorique, mais bien polémique, comme si « d’autres passions que celle de la « science pure » [avaient] été touchées par mon ouvrage »3. Plus tard, ce sont bien les conséquences politiques gênantes découlant de l’analyse de Rosa Luxemburg qui ont amené autant la social-démocratie réformiste que les bolchéviks à évincer son analyse. Cette dernière, nous rappellent Mylène Gaulard et Loren Goldner dans la postface à la présente édition, « entraîne en effet logiquement qu’une révolution prolétarienne ne pouvait se maintenir dans un pays non encore parfaitement intégré au mode de production capitaliste », et qu’ainsi « une révolution dans un pays périphérique comme la Russie se verrait contrainte à développer un féroce capitalisme d’État »4.

Dans cette première critique économique de l’impérialisme, Rosa Luxemburg a pour ambition d’aborder un ensemble de phénomènes qui lui sont (et qui nous sont) contemporains : « la lutte des États capitalistes pour les colonies et les sphères d’influence qui permettent l’investissement du capital européen, le système des emprunts internationaux, le militarisme, le protectionnisme et la prépondérance du capital bancaire et de l’industrie cartellisée dans la politique mondiale »5. Si l’importance et le rôle essentiel de ces phénomènes pour l’accumulation capitaliste sont évidents pour ses camarades de parti, le seul constat « empirique » lui apparaît insuffisant.

En effet, suivant en cela le geste marxien, Rosa Luxemburg estime qu’il est essentiel de « rechercher avec précision les lois économiques de cet ensemble de phénomènes variés qui constituent l’impérialisme et en mettre à nu les causes profondes » puisque « seule la compréhension théorique exacte du problème pris à la racine peut donner à notre lutte pratique contre l’impérialisme cette sûreté de but et cette force indispensables à la politique du prolétariat. »6. Autrement dit, interpréter cette tendance « impérialiste » mondiale du capitalisme comme étant structurelle.

Comment se fait-il qu’il y ait une demande croissante ?

Avant de pouvoir entrer dans la spécificité de la contribution de Rosa Luxemburg, il faut faire un rapide détour par ce qu’elle identifie comme étant problématique dans la contribution de Marx, Tougan-Baranowski et Hilferding dans leur analyse du mode de production capitaliste en poursuivant la question : « comment le capitalisme peut-il exister et se perpétuer ? ».

Pour pouvoir saisir ce qui se passe dans toute économie, il faut articuler deux points de vue, l’un est statique, l’autre est dynamique. Le premier part de la décomposition de la totalité du produit social sans se concentrer sur sa répétition : on décrit un cycle isolément. Le second point de vue s’attèle à résoudre le rapport entre les cycles de production, découpés encore dans l’économie aujourd’hui, par année, puis en cycles plus longs. Enfin, on adapte la représentation statique aux phénomènes observés dans celle dynamique.

Représentation statique

La valeur de la totalité du produit social se décompose en capital constant, capital variable et plus-value. Le capital constant et le capital variable rassemblent l’ensemble des moyens avancés par le capitaliste pour la production de marchandises. Le capital constant se divise en capital fixe, correspondant aux moyens dont on estime qu’ils ne doivent pas être investis chaque année (ce sont les machines, les bâtiments, etc.), c’est ce qui coûte le plus au capitaliste, et en capital circulant, ce sont les matières premières, l’énergie, etc. que le capitaliste doit investir à chaque fois à nouveau dans chaque cycle de production.

Le capital constant, que cela soit sur un cycle ou plusieurs (pour le capital fixe) ne fait que restituer sa valeur au produit. Le capital variable par contre, c’est la partie du capital qui a été transformée en force de travail, en plus de reproduire son équivalent, elle produit un excédent, une plus-value.

Mais toutes les marchandises ne sont pas produites pour répondre aux mêmes besoins. On doit partir de l’hypothèse la plus simple, qui a, en plus de cela, la force d’être intuitive : on produit d’une part pour pouvoir produire, ce sont des moyens de production, et on produit des moyens de consommation, c’est-à-dire des marchandises qui sont destinées à la consommation individuelle des individus. On pose comme hypothèse que l’ensemble du processus est stable, et que la part du surproduit a été dépensée en biens non nécessaires dits « de luxe » par les capitalistes. En termes mathématiques, on suppose donc l’égalité et la stabilité : c + v + pl.

Représentation dynamique

Dans la représentation statique, on a postulé que tout ce qui a été produit a été ou bien réinvesti ou bien consommé. Mais la différence fondamentale entre le mode de production capitaliste et les autres, ce n’est pas que le but de la production soit le profit (il y a toujours une plus-value), mais le profit illimité, la recherche du profit maximum7. Ce caractère illimité implique que le capitaliste essaie toujours d’extraire plus de surtravail aux salariés qu’il emploie, puisque c’est dans l’ensemble, la seule grandeur qui varie. Tous les autres faisant la même chose, le capitaliste n’a pas le choix, il doit toujours chercher plus de profit, au risque de disparaître, c’est la concurrence. Ceci implique qu’à chaque cycle, un capital constant additionnel et un capital variable additionnel soient mis en action. Cela signifie qu’une partie de la plus-value est consacrée à ce réinvestissement, qu’elle sert à valoriser, produire plus de moyens de production pour produire plus de marchandises. Mais qui peut acheter ces marchandises, si, en plus de cela, une partie de la plus-value ne peut pas été utilisée pour acheter le surplus de marchandises produites ?

Où sont les acheteurs ?

Rosa Luxemburg tente alors de répondre par différents moyens à la question : « où sont les acheteurs de ce produit supplémentaire que les capitalistes eux-mêmes ne consomment pas et que les ouvriers peuvent encore moins consommer »8 ? Pour pouvoir élargir la production, il ne faut pas seulement considérer que les capitalistes investissent plus dans les moyens de production, mais il faut aussi que les marchandises produites en excédent puissent être consommées. C’est ce que Rosa Luxemburg appelle « l’augmentation de la demande solvable de marchandises »9, une condition que Marx n’aurait pas suffisamment pris en compte dans ses schémas de reproduction. Rosa Luxemburg va successivement analyser diverses réponses que l’on peut apporter à ce problème.

Se pourrait-il être les capitalistes qui absorbent ces nouvelles marchandises ? Non, puisque « la base de l’accumulation est précisément la non-consommation de la plus-value par les capitalistes »10. Une autre hypothèse, serait la suivante : puisqu’il faut plus de moyens de consommation, il faut plus de moyens de production. Dans ce cas, qui aurait besoin de plus de moyens de consommation ? Rosa Luxemburg relève ici un raisonnement circulaire et « absurde du point de vue du capitaliste », parce que Marx répond alors qu’il faut plus de moyens de consommation parce qu’il y a besoin de plus d’ouvriers, c’est-à-dire de moyens de production.

Cet accroissement de la demande proviendrait-elle de l’augmentation de la population ? Cela n’a pas de sens puisque dans un certain sens, l’augmentation de la population est déjà prise en compte dans l’attribution du salaire aux ouvriers, soit en leur permettant de nourrir leurs enfants, soit, si elle ne le permet pas, en intégrant la nouvelle génération dans le processus11.

Est-ce que cette demande croissante viendrait du fait que la société capitaliste n’est pas seulement composée de deux classes, ouvriers et capitalistes, mais qu’il existe encore une grande masse de la population qui ne peuvent être comptée ni dans l’une ni dans l’autre classe ? On pense alors aux « propriétaires fonciers, employés, membres des professions libérales (avocats, artistes, savants), puis l’Église avec ses ervants, le clergé, et enfin l’État, avec ses fonctionnaires et l’armée »12. Non plus, parce qu’« en tant que consommateurs de plus-value, ils sont à compter dans la classe capitaliste »13, à la différence seule du clergé qui tire aussi « une partie de ses ressources des travailleurs »14.

Cela proviendrait-il alors du commerce extérieur ? Non plus, parce que l’on considère la société capitaliste dans son ensemble et que ce faisant, on ne fait que déplacer le problème, sans le résoudre, d’un Etat capitaliste à un autre. La conclusion à laquelle Rosa Luxemburg aboutit, c’est donc « qu’il faut qu’il y ait une perspective de débouchés […] qui se trouvent en dehors des sections I et II »15. Le problème qui résulte de cette conclusion, c’est que la plus-value ne peut pas être totalement réalisée, et donc que le processus de valorisation, de reproduction du capital en tant que maximisation du profit n’est pas possible. En fondant la nécessité que les marchandises produites en excédent soient consommées par des individus extérieurs à la formation capitaliste, Rosa Luxemburg explique la montée des politiques impérialistes du XIXe siècle.

Crise de valorisation ou crise de réalisation ?

Tout l’intérêt de L’Accumulation du capital consiste dans son actualité dans des débats qui n’ont depuis un siècle pas changé, sinon tout au plus, dans les termes qui sont utilisés. En concentrant dans cet ouvrage son analyse sur le problème de la réalisation de la plus-value, Rosa Luxemburg a été bien souvent considérée comme une précurseure de Keynes. Ce dernier situe en effet les difficultés rencontrées par le capitalisme dans des crises de surproduction provoquées par l’insuffisance d’une demande solvable, c’est-à-dire des salaires trop bas. Une idée largement répandue, et par exemple véhiculée par la préface de la première version anglaise de L’Accumulation du capital (1951) est que Rosa Luxemburg tend à « situer l’origine des crises dans la sphère de la circulation »16. Or, si Rosa Luxemburg avait exclusivement fait de l’origine des crises un problème seul de réalisation, elle aurait du rejeter l’analyse de Marx sur la baisse tendancielle du taux de profit, or, comme le rappellent Mylène Gaulard et Loren Goldner, d’une part elle ne l’a jamais rejetée, mais d’autre part, comprendre sa contribution théorique, c’est comprendre qu’ « elle ne faisait qu’en minimiser les conséquences de court terme sur le processus d’accumulation »17.

Cependant, en examinant « la manière dont le capitalisme ne cesse de sortir de lui-même pour aller parasiter les diverses formes non capitalistes de l’activité sociale »18, la théorie de Rosa Luxemburg permet également de comprendre les difficultés que rencontre le capitalisme depuis une trentaine d’années en ce que la réalisation de la plus-value est limitée objectivement par l’intégration de la Périphérie au processus capitaliste19. Mais encore une fois, il ne s’agit pas de dissoudre l’ensemble des phénomènes de crise à cette explication. Il s’agit bien de replacer l’accumulation « dans son milieu », c’est-à-dire « dans son interaction avec les formations non capitalistes qui suppléent à ses contradictions internes » (chapitre 26).

C’est ainsi qu’un terme à présent revenu sur l’avant de la scène notamment avec John Bellamy Foster ou dernièrement avec Judith Butler, celui de « métabolisme » qui prend une signification moins écologique que géopolitique. Et c’est dans les derniers chapitres que l’on s’aperçoit que la réalisation de la survaleur non consommée à l’extérieur n’est qu’un terme ultime du rapport qui s’est développé entre les sociétés non capitalistes et capitalistes. Comme le font remarquer Ulysse Lojkine et Guillaume Fondu dans la préface, c’est seulement à ce moment, celui où le capitalisme est déjà en train de s’établir en périphérie, que Rosa Luxemburg emploie le terme d’impérialisme : « celui-ci se manifeste par l’exportation des capitaux du centre vers les nouvelles sociétés capitalistes »20, particulièrement aux moyens d’investissement par les pays européens dans des projets d’infrastructure dans les périphéries, à l’exemple du canal de Suez.

La manière dont Rosa Luxemburg a été reçue, autant chez les réformistes que parmi les marxistes est une énième illustration du fait que les controverses riches sur la théorie des crises souffrent parfois de divergences plus artificielles que réelles. C’est pourquoi une volonté affirmée d’acquérir une compréhension claire et globale des ressorts et limites du capitalisme doit partir aujourd’hui du constat suivant : « Nous considérons comme stérile l’opposition séculaire et majeure entre les tenants de l’explication des crises de surproduction par la suraccumulation (la baisse tendancielle du taux de profit) et ceux se référant à l’insuffisance de la demande solvable (les marchés) : cette opposition n’existe ni dans la théorie de Marx, ni dans la réalité. »21

Dans cette mesure, la mise au point effectuée par les postfaciers de l’inconsistance de cette opposition pour l’analyse de Rosa Luxemburg en fait un instrument théorique et politique tout autant actuel que ses implications politiques internationalistes sont radicales. En fournissant une analyse des contradictions internes et externes du capitalisme, Rosa Luxemburg nous propose une théorie puissante des liens entre impérialisme et capitalisme. En termes contemporains, nous dirions qu’elle tente de prouver que mondialisation et capitalisme sont indissociables.

A tous ceux donc qui identifient la mondialisation, avec ses délocalisations, ses « crises migratoires » comme des problèmes à part entière, dissociables du capitalisme, et se font partisans de solutions protectionnistes, défendent le chavisme ou l’URSS, nous ne pouvons que recommander la lecture de cet ouvrage majeur de la critique de l’économie politique. Il permet de comprendre plus précisément ce qui est capitaliste ou ne l’est pas. Pour finir, si les limites du capitalisme apparaissent au premier abord objectives, ce que Rosa Luxemburg nous montre c’est qu’elles sont, en dernier terme et contre tout effondrisme que l’on voudrait lui imputer, sociales.

1Certains estimaient effet que le capitalisme se précipiterait plus rapidement vers sa chute si on le laissait se développer sans intervenir.

2En 1910 paraît Le capital financier de Rudolf Hilferding, dans lequel il désigne par « impérialisme » le fait qu’« une part toujours croissante du capital industriel n’appartient pas aux industriels qui l’utilisent. Ces derniers n’en obtiennent la disposition que par le canal de la banque » lié à une monopolisation des capitaux. Sa théorie de l’impérialisme, inspirera largement Lénine. Voir notamment le chapitre 3, « Le capital financier et l’oligarchie financière », de « L’impérialisme, stade suprême du capitalisme », reformulé par ce dernier comme « Concentration de la production avec, comme conséquence, les monopoles ; fusion ou interpénétration des banques et de l’industrie ».

3Rosa Luxemburg, L’Accumulation du capital, Œuvres complètes, Tome V, Agone-Smolny, novembre 2019, p. 494.

4Ibid. p. 621.

5Ibid. p. 509.

6Ibid. p. 509

7Ainsi, le but premier des capitalistes, ce n’est pas de « s’en mettre plein les poches », voir à ce sujet la contribution essentielle d’Alain Bihr, La reproduction du capital, particulièrement à ce sujet, ibid. p. 205 sq.

8Ibid. p. 129.

9Ibid. p. 117.

10Ibid. p. 117.

11Ibid. p. 119

12Ibid. p. 119.

13Ibid. p.120

14Ibid. p. 120

15Ibid. p. 123

16Ibid. p. 624

17Ibid. p. 624. Indiquons au passage que la « loi de la baisse tendancielle du taux de profit » a des effets contradictoires, voir à ce sujet de nombreuses contributions, dont celle de Michel Vadée, Marx penseur du possible, p. 82.

18Ibid. p. XXII.

19Voir à ce propos, la postface de Mylène Gaulard et Loren Goldner, Ibid. p. 611.

20Ibid. p. XXXII

21Marcel Roelandts, Dynamiques, contradictions et crises du capitalisme, Contradictions, 2010, p. 5.

 

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4 avril 2020 6 04 /04 /avril /2020 13:38
Est-ce que je suis encore vivante? Clara Zetkin, sa lettre poignante et lucide à Mathilde Jacob le 18 janvier 1919, après l'assassinat de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht.

Lettre à Mathilde Jacob, 18 janvier 1919

 

Hier matin est parvenue la terrible nouvelle. La veille, les journaux avaient annoncé l'après-midi l'arrestation de Karl et de Rosa. Je pensais que quelque chose de grave pouvait arriver et j'avais aussitôt télégraphié à Haase et Mme Zietz que l'on fasse tout ce qui était possible pour les protéger. J'écrivis aussi une lettre en express en ce sens à Eisner, afin qu'il use de son influence officielle. J'étais fermement décidée, malgré la maladie, les difficultés pour voyager et les conseils de Rosa me dissuadant de faire ce voyage, à venir à Berlin pour remuer ciel et terre afin de protéger ces deux êtres chers, irremplaçables.

 

Et puis, hier, les journaux du matin sont arrivés. Tout était fini, oh ma chère Mathilde, vous comprenez certainement, comment je me sens depuis cela. Car même si vous ne participiez pas à leur combat politique, vous les avez connus personnellement, humainement, et compris tous les deux, mieux que beaucoup de militants politiques. Vous savez ce qu'on leur a fait subir. Et c'est pourquoi je viens vers vous avec tout mon désespoir. Est-ce que je suis encore vivante et puis-je encore vivre après ce qui est arrivé de pire? Je voudrais pleurer, je voudrais lancer un cri si puissant qu'il ébranle, renverse ce monde; et surtout ne pas penser, ne pas penser à cette chose terrible : ils sont morts, assassinés, assassinés de la plus cruelle des façons. Je ne comprends pas que la vie puisse continuer son cours sans Karl et Rosa, que dehors le soleil brille. Il nous semble qu'il a perdu de son éclat et que le temps s'est arrêté, qu'il ne veut pas aller au-delà de ce terrible événement. Oh, Mathilde, Mathilde, qu'avons-nous perdu! Votre attention nous fait du bien, mais elle ne peut atténuer notre désespoir. Pour Rosa, pour elle, nous voulons tenter de continuer à vivre sans elle. Mais il n'est pas sûr que nous en soyons capables, que cela ne dépasse pas nos forces. Et notre propre désespoir nous fait penser aux souffrances de nos autres amis. Comme vous devez souffrir, très chère Mathilde, comme doivent souffrir le pauvre Leo, dans sa prison, la malheureuse Sonja dont Karl était le sens même de la vie, les âmes simples, modestes qui ont travaillé et lutté ces derniers temps avec eux. Nous sommes unis dans notre détresse.

 

Mathilde, serons-nous capables de supporter cela, de vivre sans ces deux êtres, de vivre sans Rosa? Tenter de le faire n'a de sens pour moi que si nous pouvons donner à la vie ce sens : travailler et combattre, fidèles à leur esprit, au sein des masses, avec les masses, veiller, faire en sorte que l'esprit de ces deux être assassinés continue à guider notre action. C'est pour moi ce testament que me laisse Rosa. Cela signifie aussi, rassembler et faire connaître tous ses travaux. Ce sont pour nous des biens précieux, vivants, qui nous sont légués, des biens qui appartiennent aux masses, ils constitueront, avec ce que construira dans l'avenir le mouvement révolutionnaire, le monument digne de Rosa, plus durable que la pierre. Je veux mettre toutes mes forces pour que Karl et Rosa aient le seul monument digne d'eux, au sein de la littérature socialiste et dans l'histoire.

 

Très chère amie, c'est là votre tâche, veiller à ce que pas un feuillet, pas une ligne des manuscrits de Rosa ne soit oublié, que pas un seul de ses anciens travaux, articles, brochures etc., déjà imprimé, ne soit perdu. Vous devez veiller étroitement à ce que, sous prétexte de décisions de justice, perquisitions, etc., rien, rien du tout de ce qui représente l'héritage politique  et intellectuel de Rosa ne puisse être confisqué. Vous avez besoin pour tout cela d'un avocat. Espérons que vous pourrez en trouver un qui possède la compréhension exacte et la force nécessaire. L'héritage de Rosa, sa pensée,  doit être défendu, il appartient au prolétariat révolutionnaire. De même, des personnes non qualifiées, telles que Kautsky & Co ne doivent pas mettre la main dessus. Ce serait une profanation de son cadavre. Ah, si seulement Léo était libre! Il nous faut aussi rassembler tous les anciens travaux de Rosa. Je crains que Rosa ait fait comme moi. Il lui suffisait de lancer ses idées au sein du mouvement, les distribuant sans compter, mais elle n'a pas rassemblé ses travaux. Nous devons donc les rechercher dans les journaux et les revues. Particulièrement importants sont ses écrits des dernières années et des dernières semaines. "Die Rote Fahne" sera pour cette révolution, ce qu’a été la "Rheinische Zeitung" pour la révolution de 1848 : la voix directrice du socialisme. C'est là qu'a battu le cœur de la révolution.

 

L'assassinat de Karl et Rosa a tout de l'exécution d'un contrat. Les massacreurs du gouvernement craignaient les désagréments et l'effet dévastateur d'un procès, ils craignaient le combat sans merci que tous les deux menaient, un temps empêché, mais qui ne pouvait jamais être brisé. Ils ont voulu ôter à la révolution, ce bras courageux mis au service de la lutte, ce cerveau brillant, capable de l'orienter, ce cœur brûlant de passion.

Karl et Rosa ont été assassinés. Non! Ils ne vivront pas seulement pour nous, ils vivront pour les masses, ils devront vivre pour lesquelles ils se sont donnés, sacrifiés, corps et âmes. Est-ce que des cœurs comme les leurs peuvent s'arrêter de battre, des esprits comme les leurs s'arrêter de briller, de créer? Je viens à Berlin dès que je peux, pour parler de tout cela personnellement, ce qui est à peine possible par courrier. Dites à nos amis que je suis plus que jamais auprès d'eux, que nous devons serrer les dents et "tenir". C'est ce que demandent les morts aux vivants. Si c'est possible, donnez-moi des nouvelles, mais seulement en recommandé. J'ai reçu votre dernière lettre en même temps qu'une lettre de huit pages écrite par Rosa dans le feu, le danger de l'action. Une si gentille lettre - Tout à fait Rosa, et maintenant - Il ne faut pas que je pense.

 

Chère bonne amie, excusez-moi, de ne plus être maître de moi. Cela dépasse mes forces. Saluez tous ceux qui partagent notre souffrance. Je vous embrasse de toute mon amitié.

 

Votre Clara Zetkin

 

Traduction Dominique Villaeys-Poirré

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

Mathilde Jacob

Mathilde Jacob

Clara Zetkin est connue internationalement pour son combat pour les droits des femmes et sa proposition d'une journée internationale en 1910. Mais elle a été aussi partie prenante du courant révolutionnaire et de la révolution en Allemagne. Elle a été de tous les combats de Rosa Luxemburg depuis son arrivée en Allemagne et jusqu'aux derniers jours de la révolution. Les liaient une amitié indéfectible politique et sensible. La lettre est adressée à Mathilde Jacob, la secrétaire de Rosa Luxemburg qui sauva en effet une grande partie des écrits de Rosa Luxemburg, comme elle en avait déjà fait sortir un certain nombre de prison. Mathilde Jacob est morte en déportation. La démocratie en Allemagne est née de ces assassinats, de l'assassinat de la révolution. Elle a ainsi fait le lit du nazisme. Clara Zetkin a continué jusqu'au bout son combat. C'est elle qui en tant que doyenne a fait un discours, tout de courage, en 1932 devant la Chambre des députés envahie par le fascisme.

Cette lettre est étrangement inédite en français sur le net. Est-elle seulement publiée. Nous en proposons ici une première traduction. Merci pour toute proposition d'amélioration. Dominique Villaeys-Poirré. Texte publié sur le blog en janvier 2019.

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4 avril 2020 6 04 /04 /avril /2020 13:32
L'assassinat de Leo Jogiches, le plus proche camarade de Rosa Luxemburg et l'un des principaux animateurs du courant révolutionnaire, le 10 mars 1919. Abattu comme elle et comme K. Liebknecht, alors qu'il avait été arrêté par les troupes gouvernementales et les corps francs sous la direction de Noske, dirigeant social-démocrate.

Lors des journées révolutionnaires de mars 1919, il y a eu plus de 1200 victimes. Dès le 3 mars, Noske, ministre de l'intérieur social-démocrate avait décrété l'état d'urgence à Berlin et possédait donc les pleins pouvoirs. Comme en janvier, il s'appuyait sur les corps francs et les troupes gouvernementales. Peu de jours après, il donnait à ces troupes l'ordre d'abattre toute personne porteuse d'une arme suite à l'annonce de la mort de plusieurs dizaines de policiers, information qui s'est révélée totalement fausse. Cet ordre est resté en vigueur jusqu'au 16 mars.

 

Le 10 mars, dans le cadre de cette traque, Leo Jogiches était arrêté et abattu d'une balle dans le dos, sous prétexte de tentative de fuite. Auparavant, il avait été si maltraité qu'il en était défiguré comme en témoigna Mathilde Jacob, qui se rendit à la morgue.

 

Abattus comme des "chiens", comment peut-on dire autrement, Rosa Luxemburg, Karl Liebknecht et Leo Jogiches l'ont été alors qu'ils étaient arrêtés et sans armes.

 

Comme le dit Clara Zetkin dans sa lettre écrite quand elle a appris la mort de Rosa Luxemburg et Karl  Liebknecht, ces exécutions ont tout de l'exécution d'un contrat.

 

Il fallait en fait faire taire ces voix lumineuses et ce qu'elles représentaient au sein du mouvement ouvrier, de capacités de penser, de volonté de lutter, d'humanisme et de sensibilité.

 

Il fallait de fait juguler toute tentative révolutionnaire au sein du mouvement ouvrier.

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4 avril 2020 6 04 /04 /avril /2020 10:44
Ils ont été abattus comme des chiens, Il faut le dire, il faut mettre les mots. Rosa Luxemburg, Karl Liebknecht, Leo Jogiches ont été abattus comme des chiens.Ils ont été abattus comme des chiens, Il faut le dire, il faut mettre les mots. Rosa Luxemburg, Karl Liebknecht, Leo Jogiches ont été abattus comme des chiens.Ils ont été abattus comme des chiens, Il faut le dire, il faut mettre les mots. Rosa Luxemburg, Karl Liebknecht, Leo Jogiches ont été abattus comme des chiens.

Cela fait trente-cinq ans que je côtoie Rosa Luxemburg et par son intermédiaire tout le courant révolutionnaire qui finira par se structurer en un petit groupe cohérent, L'Internationale" au moment du ralliement de la social-démocratie à la boucherie mondiale, puis dans le courant spartakiste, qui prônera une révolution sur des bases de classe.

 

Trente-cinq ans que je vibre à leur sensibilité, à leur intelligence, à leur conscience, à leur courage.

 

Et je suis écoeurée par ce consensus mou qui aujourd'hui traverse l'hommage rendu par ceux-là même qu'elle a toujours combattus, et qui tait ce qui s'est véritablement passé.

 

Qui ne met pas les mots sur l'horreur des faits.

 

Rosa Luxemburg, Karl Liebknecht, Leo Jogiches ont été abattus comme des chiens. Ils avaient été arrêtés sans armes, ils ont été exécutés sans aucun procès, ils ont été abattus pour Rosa Luxemburg d'un coup de crosse, Liebknecht exécuté à bout portant, Leo Jogiches d'une balle dans le dos, tous les trois alors pourtant entre les mains des forces de "l'ordre" sur lesquelles s'appuyait la social-démocratie pour assassiner la révolution qu'elle craignait tant.

 

De ce magnifique groupe qui constituait en pleine guerre l'Internationale, et avec la mort de Franz Mehring qui s'éteint foudroyé après la mort de ses deux amis, il ne va rester comme figure connue que Clara Zetkin, dont on ne peut imaginer comment elle a pu survivre à ces meurtres, à cette barbarie, le corps de Rosa Luxemburg même pas retrouvé encore au moment de son inhumation.

 

Les mots, il faut les dire, pour que personne ne l'ignore plus. Rosa Luxemburg, Karl Liebknecht, Leo Jogiches ont été abattus comme des chiens.

 

Dominique Villaeys-Poirré

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

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15 juin 2019 6 15 /06 /juin /2019 16:02
L'assassinat de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht dans la presse française (4). Le Populaire, A Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg, martyrs!

A consulter sur Gallica : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8172059/f1.image.r=rosa%20luxemburg%201919rosa%20luxemburg

Le Populaire est un journal socialiste français. Le 1er mai 1916, Le Populaire, journal revue hebdomadaire de propagande socialiste et internationaliste est fondé par des socialistes minoritaires (hostiles à la guerre) grâce au soutien de la fédération de la Haute-Vienne, propriétaire depuis 1905 du quotidien Le Populaire du Centre. Jean Longuet, petit-fils de Karl Marx, en est le premier directeur politique avec Maurice Delépine comme responsable de la rédaction, le limousin Léon Berland étant administrateur. Le journal se transforme en quotidien parisien du soir le 11 avril 1918. Le Populaire est diffusé de 20 à 50 000 exemplaires en 1919, avec l'appui des Amis du Populaire et la fête du Populaire à Garches. Le Populaire devient en 1921, après le ralliement de L'Humanité au parti communiste, majoritaire au congrès de Tours, l'organe de la SFIO, mais dès l'année 1920 il a beaucoup perdu de son audience. (source Wikipedia)

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14 juin 2019 5 14 /06 /juin /2019 18:38
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6468229g/f3.image.r=karl%20liebknecht

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6468229g/f3.image.r=karl%20liebknecht

Vous pouvez consulter cet article (et le journal) sur Gallica :

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6468229g/f3.image.r=karl%20liebknecht

Hebdomadaire du Parti communiste 1925/1930

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8 juin 2019 6 08 /06 /juin /2019 09:43
L'assassinat de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht dans la presse française (1). L'Attaque du dimanche 19 janvier 1919 titre Comment périt Liebknecht
Titré "Comment périt Karl Liebknecht", l'article en date du 19 janvier 1919, porte en sous-titre "La mort de Rosa Luxemburg est confirmée"

Il est des plus intéressants, outre le fait qu'il annonce la mort de Rosa Luxemburg, parce qu'il montre clairement le mensonge d’État de la première version fournie par les autorités militaires, et aussi les premières rectifications données par le gouvernement et reprises par l'agence Wolf selon l'article.

Source :

L'Attaque : organe socialiste révolutionnaire de la jeunesse / rédacteur en chef Ernest Gegout

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb32706292b/date1919

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6259614z.item

 

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Grève de masse. Rosa Luxemburg

La grève de masse telle que nous la montre la révolution russe est un phénomène si mouvant qu'il reflète en lui toutes les phases de la lutte politique et économique, tous les stades et tous les moments de la révolution. Son champ d'application, sa force d'action, les facteurs de son déclenchement, se transforment continuellement. Elle ouvre soudain à la révolution de vastes perspectives nouvelles au moment où celle-ci semblait engagée dans une impasse. Et elle refuse de fonctionner au moment où l'on croit pouvoir compter sur elle en toute sécurité. Tantôt la vague du mouvement envahit tout l'Empire, tantôt elle se divise en un réseau infini de minces ruisseaux; tantôt elle jaillit du sol comme une source vive, tantôt elle se perd dans la terre. Grèves économiques et politiques, grèves de masse et grèves partielles, grèves de démonstration ou de combat, grèves générales touchant des secteurs particuliers ou des villes entières, luttes revendicatives pacifiques ou batailles de rue, combats de barricades - toutes ces formes de lutte se croisent ou se côtoient, se traversent ou débordent l'une sur l'autre c'est un océan de phénomènes éternellement nouveaux et fluctuants. Et la loi du mouvement de ces phénomènes apparaît clairement elle ne réside pas dans la grève de masse elle-même, dans ses particularités techniques, mais dans le rapport des forces politiques et sociales de la révolution. La grève de masse est simplement la forme prise par la lutte révolutionnaire et tout décalage dans le rapport des forces aux prises, dans le développement du Parti et la division des classes, dans la position de la contre-révolution, tout cela influe immédiatement sur l'action de la grève par mille chemins invisibles et incontrôlables. Cependant l'action de la grève elle-même ne s'arrête pratiquement pas un seul instant. Elle ne fait que revêtir d'autres formes, que modifier son extension, ses effets. Elle est la pulsation vivante de la révolution et en même temps son moteur le plus puissant. En un mot la grève de masse, comme la révolution russe nous en offre le modèle, n'est pas un moyen ingénieux inventé pour renforcer l'effet de la lutte prolétarienne, mais elle est le mouvement même de la masse prolétarienne, la force de manifestation de la lutte prolétarienne au cours de la révolution. A partir de là on peut déduire quelques points de vue généraux qui permettront de juger le problème de la grève de masse..."

 
Publié le 20 février 2009