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Assassinat de Rosa Luxemburg. Ne pas oublier!

Le 15 janvier 1919, Rosa Luxemburg a été assassinée. Elle venait de sortir de prison après presque quatre ans de détention dont une grande partie sans jugement parce que l'on savait à quel point son engagement contre la guerre et pour une action et une réflexion révolutionnaires était réel. Elle participait à la révolution spartakiste pour laquelle elle avait publié certains de ses textes les plus lucides et les plus forts. Elle gênait les sociaux-démocrates qui avaient pris le pouvoir après avoir trahi la classe ouvrière, chair à canon d'une guerre impérialiste qu'ils avaient soutenue après avoir prétendu pendant des décennies la combattre. Elle gênait les capitalistes dont elle dénonçait sans relâche l'exploitation et dont elle s'était attachée à démontrer comment leur exploitation fonctionnait. Elle gênait ceux qui étaient prêts à tous les arrangements réformistes et ceux qui craignaient son inlassable combat pour développer une prise de conscience des prolétaires.

Comme elle, d'autres militants furent assassinés, comme Karl Liebknecht et son ami et camarade de toujours Leo Jogiches. Comme eux, la révolution fut assassinée en Allemagne.

Que serait devenu le monde sans ces assassinats, sans cet écrasement de la révolution. Le fascisme aurait-il pu se dévélopper aussi facilement?

Une chose est sûr cependant, l'assassinat de Rosa Luxemburg n'est pas un acte isolé, spontané de troupes militaires comme cela est souvent présenté. Les assassinats ont été systématiquement planifiés et ils font partie, comme la guerre menée à la révolution, d'une volonté d'éliminer des penseurs révolutionnaires, conscients et déterminés, mettant en accord leurs idées et leurs actes, la théorie et la pratique, pour un but final, jamais oublié: la révolution.

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Avec Rosa Luxemburg.

1910.jpgPourquoi un blog "Comprendre avec Rosa Luxemburg"? Pourquoi Rosa Luxemburg  peut-elle aujourd'hui encore accompagner nos réflexions et nos luttes? Deux dates. 1893, elle a 23 ans et déjà, elle crée avec des camarades en exil un parti social-démocrate polonais, dont l'objet est de lutter contre le nationalisme alors même que le territoire polonais était partagé entre les trois empires, allemand, austro-hongrois et russe. Déjà, elle abordait la question nationale sur des bases marxistes, privilégiant la lutte de classes face à la lutte nationale. 1914, alors que l'ensemble du mouvement ouvrier s'associe à la boucherie du premier conflit mondial, elle sera des rares responsables politiques qui s'opposeront à la guerre en restant ferme sur les notions de classe. Ainsi, Rosa Luxemburg, c'est toute une vie fondée sur cette compréhension communiste, marxiste qui lui permettra d'éviter tous les pièges dans lesquels tant d'autres tomberont. C'est en cela qu'elle est et qu'elle reste l'un des principaux penseurs et qu'elle peut aujourd'hui nous accompagner dans nos analyses et nos combats.
 
Voir aussi : http://comprendreavecrosaluxemburg2.wp-hebergement.fr/
 
30 janvier 2009 5 30 /01 /janvier /2009 19:41
L’imperialisme français : maillon faible ou suppletif ...                                                                                                             Par Gustave Massiah décembre 2002  
http://www.reseau-ipam.org/spip.php?article740                                                                     
                                                                                                                        
 "Une civilisation qui s’avère incapable de résoudre les problèmes que suscite son fonctionnement est une civilisation décadente. Une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte. Une civilisation qui ruse avec ses principes est une civilisation moribonde." Le fait est que la civilisation dite “ européenne ”, la civilisation “ occidentale ” telle que l’ont façonnée deux siècles de régime bourgeois est incapable de résoudre les deux problèmes majeurs auxquels son existence a donné naissance : le problème du prolétariat et le problème colonial(...) et plus loin il faudrait d’abord étudier comment la colonisation travaille à déciviliser le colonisateur, à l’abrutir au sens propre du mot, à le dégrader, à le réveiller aux instincts enfouis, à la convoitise, à la violence, à la haine raciale, au relativisme moral, et montrer (...) le progrès lent, mais sûr, de l’ensauvagement du continent Aimé CESAIRE, Discours sur le colonialisme, 1955

Pourquoi parler aujourd’hui de l’impérialisme français pour des militants engagés, en France, dans le mouvement citoyen mondial [1] ? D’abord parce qu’on ne peut pas renforcer le mouvement citoyen mondial sans prendre en charge nos responsabilités par rapport à notre propre impérialisme. Ensuite, le renforcement des luttes sociales implique la compréhension de la nature du système dominant en France. Enfin, l’impérialisme français peut nous servir d’analyseur pour comprendre la double évolution : celle du rapport entre capitalisme et impérialisme, et celle du rapport entre les formations sociales nationales et les systèmes-mondes.


L’impérialisme français [2] se définit dans la recherche d’une stratégie internationale propre du capitalisme français. Il faut donc s’interroger sur l’évolution du capitalisme français, sur le rôle dans cette évolution de la dimension internationale. Quelle est la place du capitalisme français dans la mondialisation, dans le capitalisme mondial, directement ou à travers le capitalisme européen ? Il faut aussi apprécier l’évolution de la mondialisation en tant que système de domination et s’interroger sur la place de la France dans le système de domination mondiale. Quelle est la place de l’impérialisme français par rapport au système mondial, à l’Union Européenne, à l’unilatéralisme états-unien ? Malheureusement, la notion d’impérialisme n’est pas à ranger dans le rayon des vieilles lunes. Même s’il y a des changements significatifs, il serait difficile d’analyser l’évolution et la situation actuelle s’en s’y référer. Nous faisons l’hypothèse qu’il est encore pertinent de parler d’impérialisme français.

Dans son évolution, comment caractériser l’impérialisme français, comme maillon faible ou comme un simple supplétif de la chaîne impérialiste mondiale ?

Eléments historiques

Une approche historique est nécessaire pour comprendre l’impérialisme français et ce qui, à travers sa formation, le caractérise encore. Elle est indispensable pour éclairer les questions que nous nous posons aujourd’hui. Nous proposerons une périodisation qui croise trois approches : la place de l’impérialisme dans le capitalisme français, l’évolution du système international et de la mondialisation, les luttes et les stratégies anti-impérialistes. Cette périodisation s’organise autour d’une hypothèse : nous vivons une crise structurelle de l’impérialisme [3] qui s’inscrit dans la série des trois dernières grandes crises (celles de 1815-40, de 1850-70, 1914-18). Pour apprécier les avenirs possibles, il faut tenir compte des caractéristiques de cette crise, des capacités et des tendances naturelles du système à la surmonter. Nous insisterons dans cette brève approche sur la zone d’influence de la France, en Afrique.


Le colonialisme primitif caractérise la première phase de l’impérialisme français. La bourgeoisie française, comme les autres bourgeoisies européennes, se constitue sous l’Ancien Régime, pour une large part à l’aube du capitalisme, grâce au commerce lointain qui permet d’acquérir à vil prix, et souvent par la force, des produits locaux, agricoles et artisanaux, revendus très cher en France et de vendre au dessus de leur valeur des produits manufacturés français. Ce commerce débouche sur la création de comptoirs et la conquête de territoires. Le colonialisme prolonge ce commerce lointain. Les colonies au départ sont considérées pour la fourniture des esclaves et l’extraction brute des matières premières ; toute transformation doit être faite en France, Colbert quand il définit le pacte colonial précise que les colonies ne doivent rien produire, “pas même un clou ”.

Dans ce colonialisme primitif, l’enrichissement rapide des bourgeoisies européennes n’entraîne pas de contradiction majeure à l’échelle internationale. Les structures sociales des pays colonisés ne sont pas entièrement détruites puisque le capitalisme en formation n’a pas atteint le stade de concentration, et de limitation des profits des marchés intérieurs, qui se traduira par l’exportation des marchandises puis celle des capitaux liée à la reproduction du mode de production capitaliste dans les colonies.

Cette évolution du colonialisme primitif à des formes plus élaborées, qui se fera progressivement en Grande-Bretagne et dans les pays où le capitalisme est plus avancé, passera en France par une rupture économique et politique. L’expansion coloniale française est plus le fait d’une caste militaire et d’une bureaucratie d’Etat qui ont besoin pour raffermir leur pouvoir en France de compenser par des opérations de prestige leurs défaites européennes. Jusqu’en 1914, le capitalisme français est un capitalisme de rentiers et de financiers plutôt que d’industriels et d’homme d’affaires.

Ce capitalisme sera confronté à la nécessité de l’expansion extérieure pour exporter ses contradictions (chômage, baisse des taux de profit, saturation relative des marchés) bien plus tard qu’en Grande-Bretagne. Les profits substantiels du capitalisme colonial seront retirés par les marchands alliés aux militaires qui garantissent un domaine réservé ; les investisseurs coloniaux joueront un rôle marginal limité à quelques secteurs (coton, caoutchouc, huile, navigation maritime) et à certaines régions. Les traits dominants de cette histoire caractériseront longtemps l’impérialisme français. L’importance des militaires, alliés aux marchands coloniaux, dans une expansion coloniale qui recherchera un prestige pour compenser les défaites économiques ou militaires de la France en Europe. Le rôle prépondérant de l’Etat dans l’organisation administrative des colonies, dans leur exploitation économique et dans la prise en charge directe des investissements coloniaux. L’importance prédominante des militaires et des fonctionnaires dans la société coloniale et dans les politiques coloniales, la reproduction de leurs privilèges devenant la justification principale des colonies.


L’impérialisme français se présente comme un impérialisme politico-militaire, mercantile, usurier peu capable de rivaliser avec les puissances dominantes britannique et nord-américaine. Le colonialisme français encourage les tendances au sous-développement de l’économie française et masque l’affaiblissement de l’Etat français. Le taux de profit des entreprises coloniales et les monopoles commerciaux favorisent les secteurs marginaux de l’économie permettant de différer l’adaptation à la concurrence internationale et de préférer la distribution des profits aux investissements productifs. Les concurrences inter-impérialistes sont particulièrement fortes dans la deuxième phase et caractéristiques de la période d’industrialisation qui marque le Second Empire. Les fractions les plus modernistes du capital industriel et bancaire sont engagées dans les aventures extérieures, rappelons notamment les Saint-Simoniens et le canal de Suez.
Après la guerre de 1914, le réajustement de l’économie mondiale au profit des Etats-Unis et l’éviction des investisseurs français des marchés russes et danubiens par la révolution soviétique vont se traduire par des réorientations majeures des flux de capitaux vers les colonies. L’importance des colonies dans l’économie française va se développer sans atteindre pour autant un rôle comparable à celui de l’Amérique Latine dans l’économie nord-américaine ou du Commonwealth dans l’économie britannique.

La première période, de 1917 à 1947, est celle de l’alliance entre les mouvements communistes et les mouvements de libération nationale ; cette alliance formalisée en 1920 au Congrès des peuples d’Orient à Bakou, sera confirmée au Congrès des peuples opprimés à Bruxelles en 1927. Cette période est marquée par l’ébranlement des empires coloniaux, les mouvements de population liés aux guerres. Elle est marquée par l’émergence des nouvelles formes d’organisation politiques et syndicales, par la montée d’un encadrement local dans les colonies et d’une intelligentsia qui s’autonomise. C’est aussi dans cette période que s’élabore le modèle keynésien, ou fordiste, social-libéral comme réponse à la révolution soviétique, aux luttes ouvrières, aux résistances dans les colonies et à la montée des fascismes.

La décolonisation va marquer la période 1947 à 1962. Elle commence pour l’Afrique par les massacres coloniaux dès 1945 à Sétif, en Algérie, puis en 1947 à Madagascar. C’est aussi la montée des fronts et des alliances, la naissance des partis proches du PCF, le basculement de larges fractions de la petite bourgeoisie et de la paysannerie dans les fronts de libération nationale. Les luttes de libération emblématiques sont celles de l’Indochine, de l’Algérie puis du Vietnam. La SFIO va sombrer dans le colonialisme avec l’Algérie et avec l’expédition de Suez contre l’Egypte nassérienne. Une nouvelle gauche va se former sur le refus de la colonisation, en alliance conflictuelle avec la PCF. En Afrique Noire, les luttes se radicalisent et les manifestations se succèdent. Les milieux africains en France sont en pleine ébullition. La FEANF (Fédération des Etudiants d’Afrique Noire) participe aux luttes anti-coloniales. Une partie des dirigeants des futurs Etats africains font leurs classes dans les gouvernements et les assemblées de la IVème République ; les réseaux, gaullistes et autres, commencent à esquisser la fratrie de la “ Franc’Afrique ”. La mobilité est très grande ; Mitterrand pour créer son groupe de l’UDSR, détache Houphouët-Boigny du groupe parlementaire du PCF. Houphouët et Sékou Touré commencent à diverger bien avant le non au référendum de la Guinée. Les intellectuels africains sont mobilisés, autour des “ groupes de langues ” du PCF et des mouvements politiques africains mais aussi autour des revues et des libelles.

La modernisation gaulliste a été esquissée pendant la guerre. Elle tient compte de la nouvelle situation internationale définie par les accords de Yalta, à la guerre froide et à la décolonisation. Dans le camp occidental, les Etats-Unis ont conquis une position hégémonique. Ils ont subordonné les capitalismes émergents allemand et japonais, secondarisé les britanniques et marginalisé les autres. L’impérialisme français est confronté aux luttes de libération des peuples colonisés au Vietnam, au Maghreb, en Afrique et à Madagascar. Les massacres coloniaux n’y font rien et l’essentiel de la classe politique, dont la majeure partie de la social-démocratie, confrontée à une crise sociale majeure, perd son honneur à la traîne de la bourgeoisie coloniale et de sa fraction militaire.

Après 1962, l’industrialisation prioritaire et la modernisation sociale n’excluent pas le recours massif à une main d’œuvre immigrée. La société coloniale sans disparaître a évolué, fonctionnaires et militaires se sont mués en coopérants. Une nouvelle forme d’alliance avec des bourgeoisies locales en formation connaît des succès divers. L’impérialisme français prend des formes d’exploitation indirectes mettant l’accent sur des mécanismes financiers et des institutions financières. Le conflit majeur entre les fractions archaïques liées à la domination directe (bureaucratie coloniale, sociétés commerciales, plantations) et les fractions modernistes grande industrie, banques, entreprises minières et pétrolières) tourne à l’avantage de ces dernières. La bourgeoisie française tente de se doter d’une stratégie mondiale autonome ; elle tente de combiner une stratégie européenne et une stratégie néocoloniale. Mais, malgré quelques succès, les résultats ne sont guère probants ; les intérêts anciens restent pesants, les rentes coloniales alimentent les réseaux et la corruption grandissante dans la société française. L’influence française, en dehors de quelques succès d’estime ne convainc pas, elle reste cantonnée dans les déclarations velléitaires ; la diplomatie française finit toujours par se rallier au grand frère états-unien.

Les luttes sociales et idéologiques des années soixante-dix vont achever le rêve gaulliste d’une indépendance impériale. Pompidou redéfinit un impérialisme aux dimensions du capitalisme français. La coopération s’éloigne des objectifs à long terme pour privilégier la rentabilité immédiate des affaires. La concurrence commerciale et les exportations retrouvent une place prépondérante ; les ventes d’armes définissent la coopération militaire. Avec Giscard d’Estaing l’impérialisme français s’inscrit dans une dépendance acceptée. Le capitalisme français recherche le soutien des capitalismes américains et ouest-allemands et des institutions internationales. Il n’hésite pas à faire intervenir ses troupes pour assurer la gendarmerie impérialiste dans sa zone.

La période de 1962 à 1977 pourrait être qualifiée comme celle du non-alignement. C’est une période d’intenses contradictions. Les nouveaux Etats ne sont pas stabilisés. C’est une période d’espoirs et d’initiatives. Des alliances considérées comme progressistes, mêlant des militaires, des syndicalistes, des secteurs des petites bourgeoisies, intellectuels et fonctionnaires accèdent au pouvoir. En Guinée, au Ghana, au Mali, au Sénégal, en Tanzanie, au Congo pour citer des équipes se référent à un modèle de développement d’indépendance nationale. Leur échec sera lié à des causes multiples. Elles sont bien sûr confrontées à la déstabilisation et aux coups d’état suscités par les puissances pas si anciennement coloniales. Mais, il ne faut pas oublier les erreurs internes. Ces équipes sous-estiment la paysannerie et l’importance des pouvoirs traditionnels ; elles ignorent superbement les libertés et la démocratie. Deux ans avant sa mort, un des sages de l’Afrique, Nyerere considérait que sa principale erreur était d’avoir théorisé le parti unique pour l’Afrique.

Alors que le non alignement marque des points au niveau international, en Asie avec la défaite américaine au Vietnam, et avec les deux chocs pétroliers de 73 et 77, la décolonisation africaine est en pleine crise. L’Afrique australe et les pays lusophones sont toujours colonisés, le Congo de Lumumba est ravagé, la guerre du Biafra met en place les nouvelles représentations des conflits ethniques. En France, il y a de nombreux facteurs nouveaux. Le conflit sino-soviétique se traduit particulièrement dans la FEANF ; une immigration ouvrière africaine se développe ; les coopérants permettent la mise en place des nouveaux régimes. En 1968, il y n’a pas eu que la France, il y a eu aussi les mouvements au Mexique, au Sénégal, en Côte d’Ivoire ; sans oublier le mouvement de la jeunesse américaine pour la paix au Vietnam. Une nouvelle génération de cadres africains va se former dans le mouvement des années soixante-dix. Nombreux sont ceux qui n’ont pas partagé l’euphorie de cette période qui a suivi les indépendances. Parmi d’autres, la lutte armée de l’UPC et l’engagement direct de la France dans la répression les ont alertés. Ils ne sont pas attirés par les mirages du pouvoir et voient avec effarement la course aux postes et les reniements. Mongo Beti, par exemple, dédie un de ses livres à un des nouveaux militants, “ A Diop Blondin, ... assassiné dans les geôles d’un dynaste d’Afrique. Afrique marâtre trop fertile en tyrans mercenaires ”. Une revue comme PNPA, de 1978 à 1991, inlassablement, est venue rappeler dans les périodes les plus noires, que l’Afrique continuait de résister. Elle répondait à l’outrance de la domination, du mépris par l’indignation et la colère.

La reconquête néolibérale, de 1977 à 1995, s’appuie sur la crise de la décolonisation. Celle-ci trouve ses fondements dans la domination renouvelée par le Nord et la nature de l’économie mondiale, l’échec des régimes issus de la décolonisation, l’échec de la construction de ce que Samir Amin appelle le soviétisme. Elle s’appuie sur une gestion agressive et criminelle de la crise de la dette. Le front des non-alignés s’est effondré et, une dizaine d’années après, en 1989, c’est au tour de l’Union Soviétique. La mondialisation se traduit par l’ajustement de chaque société au marché mondial ; par la montée des inégalités entre le Nord et le Sud et dans chaque pays, par la précarisation dans les sociétés du Nord et le développement de la pauvreté dans les pays du Sud. La reprise en mains n’est pas seulement économique, elle est aussi militaire. La France, surtout giscardienne, s’est fait une spécialité de l’envoi de ses parachutistes pour soutenir les régimes en danger. En Afrique même, les indépendances des colonies portugaises et de l’Afrique Australe ouvrent de nouvelles perspectives. La victoire de l’ANC en Afrique du Sud, en 1993, met fin à la colonisation dans le continent et ouvre une nouvelle période. Mais, les tentatives de démocratisation s’enlisent, les guerres se multiplient ; le génocide au Rwanda montre jusqu’où peuvent entraîner les manipulations des représentations ethniques. L’embrasement de l’Afrique des grands lacs déstabilise le continent. Une image d’une Afrique marginalisée et à la dérive s’impose dans les représentations internationales ; on en saisit mal les tenants et les aboutissants.

 L’Union Européenne a subordonné ses rapports avec l’Afrique à l’ouverture à l’Europe de l’Est d’une part, et à la logique de l’Organisation Mondiale du Commerce de l’autre. En France même, la victoire de la gauche en 1981 avait donné quelques espoirs alimentés par les discours de Cancun sur le Sud. Mais il a fallu se rendre à l’évidence, la continuité des intérêts et des réseaux a vite repris le dessus, et les déclarations de La Baule sur la démocratisation n’ont même pas pu, après une décennie de déconvenues, raviver les illusions. La manière dont sont traités les sans-papiers, les délivrances de visas, les “ normalisations ” des foyers a malheureusement montré à quel point la France, dans son rapport à l’Afrique, reste marquée par sa culture coloniale. La gauche sous ses différentes configurations, après quelques essais infructueux, se coule dans le moule de l’impérialisme français et en défend farouchement les avantages supposés. Elle ne remet pas en cause le rapport entre capitalisme français et impérialisme, elle adapte sa politique aux deux changements d’échelle avec le capitalisme européen et le capitalisme mondial. Elle banalise et légitime un système honteux. Penser que dans l’affaire Elf en France, on a beaucoup glosé sur les bottines de Roland Dumas mais que l’on a considéré que la question du rôle d’Elf en Afrique ne devait pas être abordé, est proprement scandaleux.

Eléments problématiques

Les prélèvements impérialistes [4] servent à compenser les effets tendanciels de la baisse des taux de profit et à diminuer la pression des affrontements sociaux sur le partage de la plus-value. Ils servent à financer des alliances de classes. Ils se traduisent par des arbitrages entre les fractions de la bourgeoisie, et par le financement de compensations pour les classes moyennes et une partie des couches populaires. Il n’est pas facile d’apprécier ces prélèvements. Le CEDETIM avait tenté, en 1977, une estimation. Il estimait alors que les surprofits impérialistes représentaient pour la France environ 20% de l’accumulation annuelle de capital productif. Leurs effets sont considérables sur les équilibres entre les fractions du capitalisme français et sur les rapports entre capitalisme français, européen et mondial. Ils ont joué un rôle déterminant dans la “ paix sociale ” pendant la période des trente glorieuses pour financer l’Etat-providence à la française. Ces surprofits sont aujourd’hui socialisés dans le capitalisme mondial, ils sont directement liés à la structure du commerce mondial. Il est probable que la part qu’en retire le capitalisme français reste très importante, même si elle a relativement baissé, par rapport aux autres capitalismes, américains, japonais, allemands et même aux capitalismes émergents du Sud. Les sources de surprofits méritent d’être précisées. La première est la sous-estimation des importations, particulièrement celle des matières premières ; elle provient des conditions de reproduction de la main d’œuvre dans les pays à bas revenus et du contrôle des ressources par la domination politique et militaire ; elle représentait, pour la France, plus de la moitié des surprofits. La surfacturation des produits exportés est plus faible pour la France, bien que certains marchés restent protégés, mais le développement du commerce intra-européen et la concurrence mondiale ont réduit cette source de gains qui représentait environ 10% des prélèvements. Bien que le monopole de fait sur les technologies introduit des surprofits de fait dont les brevets, abusivement nommés droits de propriété intellectuelle, ne donnent qu’une faible idée. Le montant des profits rapatriés représentait plus de 20% des surprofits ; sans compter l’accroissement considérable de valeur des actifs locaux et les remboursements indus de dette qui en font aussi partie. Pour illustrer cette situation, rappelons que les bénéfices de TOTAL en 2001 sont de 7,7 milliards d’euros, supérieurs à eux seuls à toute l’ “ aide publique au développement ” française. Il faut aussi souligner les profits tirés de la main d’œuvre immigrée, particulièrement dans l’économie des coûts de formation initiale. L’exode des cerveaux joue un rôle de plus en plus important dans cette évolution. L’internationalisation des grandes entreprises françaises est une des principales modalités d’intervention de l’impérialisme français. Les grandes entreprises françaises tirent leur profit du commerce mondial et de l’échange inégal. Les principales sont : TOTAL-ELF dans le pétrole, IMETAL dans le Nickel, les métaux non ferreux et l’uranium, PECHINEY dans l’aluminium, AVENTIS groupe pharmaceutique mondial, AIR LIQUIDE dans le gaz liquéfié, SAINT GOBAIN dans le verre et l’isolation, PSA et RENAULT dans l’automobile, MICHELIN dans les pneumatiques, LAFARGE dans le ciment, BOUYGUES dans les TP, LVMH dans le luxe, L’OREAL dans les cosmétiques, CARREFOUR et PPR dans la distribution. Enfin, il ne faut pas oublier les banques BNP-PARIBAS, SOCIETE GENERALE et CREDIT AGRICOLE et les assureurs AXA, AGF (ALLIANZ) et GROUPAMA. Dans les nouveaux arrivants, il y a les rentiers des services publics : VIVENDI-ENVIRONNEMENT, SUEZ, EDF et France Télécom. Les ventes d’armes sont un des secteurs essentiels d’intervention qui joue un rôle majeur dans la balance commerciale française et bénéficie de l’aide directe de l’Etat, à travers notamment la coopération militaire. La France a une longue tradition de marchand d’armes et même de trafiquant d’armes [5] . On peut parler de ce point de vue d’un véritable complexe militaro-industriel français. Son importance est illustrée par la réussite des groupes DASSAULT et EADS -LAGARDERE, ce dernier a de plus réussi à contrôler l’édition et une partie des médias. Le réaménagement structurel du capitalisme français est directement lié à la phase actuelle de la mondialisation. Comme ailleurs, la victoire du capital financier et le pouvoir grandissant des actionnaires accentuent une contre-offensive sociale remettant en cause le statut salarial et se traduit par une explosion des profits. Le réaménagement interne repose sur les secteurs rentiers (matières premières et pétrole, armes, eau) dans lesquels l’internationalisation et les surplus impérialistes jouent un rôle majeur. L’exportation joue le rôle de stabilisation mais dégage moins de surprofit, du fait de la concurrence ; le capitalisme français se fait violence pour investir ailleurs, comme par exemple Renault au Japon. Le cœur financier du capitalisme français est en restructuration constante autour des assurances et des banques. Les armes et les rentes (pétrole et eau) alimentent la corruption, permettent le contrôle des médias et assurent leurs emprises dans les allées du pouvoir. La bataille pour les liquidités entraîne des restructurations sauvages et favorise les “ tycoons ” (entendons les pirates) qui dans des niches, comme le luxe et la distribution, s’assurent des taux de profits élevés liés à leur faible intensité capitalistique. Le capitalisme français connaît quelques succès mais accroît sa fragilité. Le prix d’entrée dans le marché mondial, l’ouverture du marché français, l’oblige à des privatisations qui réduisent sa stabilité. L’élargissement du marché des capitaux l’amène à imposer les fonds de pension et à s’engager dans un affrontement douteux sur les retraites. La dernière période a été marquée par la volonté de restreindre le poids de la bourgeoisie étatique, accompagnant la fusion entre l’Etat et les oligopoles. Le ralliement des cadres supérieurs, à travers notamment les “ stock-options ” et l’affaiblissement du poids de la bourgeoisie étatique dans les alliances risque de lui aliéner les couches moyennes. Les colonies françaises n’ont pas toutes disparues. Les confettis de l’empire ont été pacifiés par le contrôle direct, l’assistanat, l’émigration massive, une politique d’établissement dans l’agriculture, l’industrie, le tourisme, les administrations. Ils ont été transformés en sociétés improductives, coupées de leur environnements régionaux géoculturels. Régulièrement toutefois, en Nouvelle Calédonie, dans les Antilles, en Guyane, les luttes viennent rappeler le caractère toujours actuel de la situation coloniale. La coopération joue, globalement, un rôle majeur dans l’extension du capitalisme dans les pays du Sud, dans le soutien aux régimes les plus contestables, dans le maintien et la reproduction de l’influence française. Comme le disait Mongo Beti, “ que la France défende ses intérêts c’est normal, qu’elle cherche à tirer parti de son influence, pourquoi pas, ce que nous ne supportons pas c’est l’hypocrisie et de prétendre que c’est pour notre bien. Si la France veut aider l’Afrique, qu’elle laisse les Africains tranquilles. ” Le rôle de la France dans les organisations internationales lui donne des responsabilités écrasantes, par exemple au FMI et à la Banque mondiale. Pendant quatorze ans le directeur du FMI, a été par deux fois, l’ancien directeur du Trésor en France. On ne peut pas dire qu’il était contraint d’appliquer cette politique contre son gré, la France a donc défendu, soutenu, mis en place des politiques ultra-libérales. Elle continue à jouer un rôle qui va au-delà, en influence, de son poids financier dans ces institutions, directement et à travers l’Europe qui est l’actionnaire principal du FMI. Le rôle de l’impérialisme est tout autant idéologique. Dans la grande communion du nationalisme français, les colonies ont toujours joué un rôle déterminant. Dans la construction de l’unité française, les trois jules de la Troisième République (Fabre, Simon et Ferry), se sont partagés : l’armée, les colonies, l’éducation ; toutes trois obligatoires ! Rappelons-nous aussi les visions racistes de Renan, pourtant défenseur d’une vision ouverte de la Nation, et les appels haineux de Jules Guesde contre les immigrés italiens. Voici un héritage exacerbé par les guerres en Indochine et en Algérie, que l’on retrouve dans le racisme bien présent, et toujours alimenté, qui englobe les immigrés, les musulmans, les noirs, et qui n’a garde d’oublier les juifs. La perspective mondiale et européenne n’annule pas la spécificité de l’impérialisme français. Il y a une continuité et des éléments nouveaux. La mondialisation est clairement capitaliste, et le capitalisme a toujours été mondial. Avant Rosa Luxembourg, Lénine et Fernand Braudel, Karl Marx écrivait : La véritable mission de la société bourgeoise, c’est de créer le marché mondial, du moins dans ses grandes lignes, ainsi qu’une production conditionnée par le marché mondial. Comme le monde est rond, cette mission semble achevée depuis la décolonisation de la Californie et de l’Australie et l’ouverture du Japon et de la Chine [6]. Le capitalismefrançaisjouesa carte propre mais tente aussi de passer par le capitalisme européen pour organiser le capitalisme mondial et y négocier de meilleures positions. C’est le sens de la politique de l’Union Européenne, particulièrement de l’action de Pascal Lamy, dans les négociations de l’OMC. La négociation porte par rapport aux Etats-Unis en réaffirmant la référence cardinale à la prééminence du marché mondial et à la concurrence, en cherchant à faire passer des règles acceptables par les Etats-Unis, en gardant le contact avec les zones émergentes (Inde, Afrique du Sud, Brésil, Chine) mais sans jamais rompre avec le grand frère américain. Le capitalisme français a échoué à aller plus loin dans le capitalisme européen, soit en obtenant un domaine réservé, soit en faisant partager certains investissements sauf dans l’armement où émergent des groupes pan-européens. Sa tentative pour faire prendre en charge par l’Union Européenne sa zone d’influence directe n’a pas résisté à la libéralisation capitaliste à l’est de l’Europe. L’impérialisme français s’inscrit dans un système international et une chaîne impérialiste. Ce système ne se réduit pas à l’économique. La forme empire est un des modes d’organisation des systèmes-mondes et n’est pas simplement le stade suprême du capitalisme. Le rapport entre la France, l’Europe et les Etats-Unis ne se déduit pas linéairement des rapports entre les capitalismes français, européen et états-uniens. Quelle est la nature de l’hégémonie américaine, la signification de l’unilatéralisme américain. Immanuel Wallerstein [7] propose de considérer que les Etats-Unis ont perdu l’hégémonie économique et l’hégémonie idéologique ; il ne conserverait que l’hégémonie militaire ce qui est le propre des empires en déclin et qui rend encore plus grands les dangers de guerres. Dans cette situation, l’impérialisme français occupe sa place et tient son rang, il veille à l’évolution de sa zone d’influence. La question est posée au niveau de l’Europe. L’Europe est partie prenante de l’impérialisme mondial, notamment dans la part qu’elle prend dans la structuration du commerce mondial et des avantages qu’elle en retire. Même s’il existe des mécanismes convergents, il n’y a pas pour autant un impérialisme européen spécifiquement constitué et différencié des impérialismes nationaux, une stratégie internationale du capitalisme européen, une zone d’influence européenne, un statut de puissance. Plusieurs conceptions sont envisageables : une section européenne d’un impérialisme mondialisé fermement dirigé par les Etats-Unis ; un impérialisme européen assumant plus clairement une position concurrentielle par rapport à l’hégémonie américaine ; une Europe ouverte préfigurant une nouvelle perspective de région géoculturelle défendant une approche d’un système mondial fondé sur des avancées du droit international et un rééquilibre dans les rapports Nord-Sud. L’avenir reste ouvert, même si la situation et les choix actuels ne conduisent guère à l’optimisme.

La montée en puissance d’un mouvement social et citoyen européen, initié avec le processus des forums sociaux européens, sera-t-elle suffisante pour compenser l’inertie institutionnelle qui à travers diverses déclinaisons, reste marquée par la vision d’un système-monde caractérisé par des formes de domination et d’impérialisme ? Pour le mouvement citoyen, et plus particulièrement en France, une stratégie d’émancipation doit s’engager dans trois directions : soutenir les forces sociales et citoyennes qui remettent en cause les rapports de domination dans leurs sociétés ; remettre en cause les mécanismes qui dans le système mondial reproduisent les rapports de domination ; lutter contre tout ce qui, dans la société française, conforte la domination extérieure et s’appuie sur ces mécanismes de domination pour renforcer les inégalités, les discriminations, les exploitations dans la société française. Nous n’oublions pas qu’un peuple qui en opprime un autre n’est pas un peuple libre ; c’est le fondement de la solidarité internationale.

 [1] Une version abrégée de ce texte est publiée dans le “ numéro spécial sur l’impérialisme ” des Cahiers de Critique Communiste (février 2003) [2] CEDETIM, L’impérialisme français, Editions Maspéro, 1980. On trouvera dans ce livre les principales références au débat sur l’impérialisme français ; des travaux sont en cours au sein du CEDETIM pour les actualiser et les renouveler [3] Samir Amin, Alexandre Faire, Gustave Massiah, Mahmoud Hussein, La Crise de l’Impérialisme, Editions de Minuit, 1979 [4] Cedetim, L’impérialisme français, Editions Maspéro, 1980 [5] C.I.I.C.A.N., Les trafics d’armes de la France, Editions Maspéro, 1977 [6] Karl Marx à Friedrich Engels, le 8 octobre 1858. [7] Immanuel Wallerstein, Le capitalisme historique, Editions La Découverte, 1998
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11 janvier 2009 7 11 /01 /janvier /2009 11:46
Pour consulter le blog: comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com

Le texte repris sur Bellaciao a donné lieu à des réactions. L'une nous a profondément surpris et a donné lieu à d'autres réactions. Voici ces réactions et la nôtre.

Ce blog est né d'une recherche commencée en plein combat il y a de nombreuses années. Elle a toujours accompagné ce combat. Parce que c'est justement ce qui marque dans la pensée et l'action de Rosa Luxemburg: le combat. Jamais déconnecté de la pratique et qu'il l'amènera en prison et qui sera la cause de son assassinat. Et c'est pourquoi aujourd'hui en pleine guerre contre la Palestine, devant les meurtres à Gaza, devant l'occupation israélienne de la Palestine, avec les murs qui emprisonnent une population que l'on peut ensuite dans ce nouveau ghetto assassiner, son souvenir est essentiel, essentiels sa pensée et son combat, essentiel de comprendre les raisons de son assassinat et ses conséquences qui à long terme sont bien le fascisme après la trahison des partis sociaux-démocrates, et donc la création de l'Etat d'Israel par les occidentaux et les expulsions des populations en 48, puis toutes les guerres et aujourd'hui Gaza.



L’assassinat de Rosa Luxemburg le 15 janvier 1919 - Ne pas oublier !
7 janvier 2009 - 23h02 - Posté par 90.**.160.**

Sachant que Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht ont été assassinés par les socialistes eux-mêmes.

Sachant que les socialistes des deux bords (Français et Allemands) ont voté les crédits de guerre (14-18), et que les socialistes français n’auraient pas pu les voter tant que Jaurès était en vie, je ne pose pas, contrairement à certain, la question "Pourquoi ont-ils tué Jaurès ?", mais :

QUI a tué Jaurès ? !




L’assassinat de Rosa Luxemburg le 15 janvier 1919 - Ne pas oublier !
7 janvier 2009 - 23h46 - Posté par 79.**.76.***

Le n° 4 du bulletin Critique Sociale est consacré à Rosa Luxemburg.

Voir aussi ce site luxemburgiste.




L’assassinat de Rosa Luxemburg le 15 janvier 1919 - Ne pas oublier !
8 janvier 2009 - 00h07 - Posté par 77.***.99.***
La mort de Luxembourg et Liebknecht il y a 90 ans ne doit pas nous faire oublier les centaines d’innocents massacrés tous les jours depuis 2 semaines. Faut pas déconner quand même.


L’assassinat de Rosa Luxemburg le 15 janvier 1919 - Ne pas oublier !
8 janvier 2009 - 00h49 - Posté par 90.**.247.***
Le sioniste est du côté du capitalisme et des puissants. En luttant contre le sionisme tu va trouver que c’est le même combat que contre la capital.

L’assassinat de Rosa Luxemburg le 15 janvier 1919 - Ne pas oublier !
8 janvier 2009 - 01h07 - Posté par 77.***.86.**
oui mais il s’agit de remettre en perpective l’implication de la social démocratie dans la montée du nazisme. Ce qui se passe actuellement est un indicateur troublant

L’assassinat de Rosa Luxemburg le 15 janvier 1919 - Ne pas oublier !
8 janvier 2009 - 07h45 - Posté par lieb - 83.***.46.***

Nous sommes mobilisés depuis deux semaines nous-mêmes contre les massacres en Palestine, c’est clair et depuis de longues années contre toutes les guerres menées par Israel et son occupation de la Palestine.

La recherche sur Rosa Luxemburg nous aide simplement à comprendre les racines de l’impérialisme, de la guerre, du colonialisme - et aujourd’hui de l’occupation de la Palestine. Et l’importance d’un combat anti-impérialiste conséquent.

comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com



L’assassinat de Rosa Luxemburg le 15 janvier 1919 - Ne pas oublier !
8 janvier 2009 - 09h03 - Posté par 159.**.249.***

La mort de Luxembourg et Liebknecht il y a 90 ans ne doit pas nous faire oublier les centaines d’innocents massacrés tous les jours depuis 2 semaines. Faut pas déconner quand même.

n importe quoi ... ou est il question d oublier qui que ce soit ?

il est juste important de ne pas oublier ceux qui luttèrent et périrent ,ceux qui furent emprisonnés ou le sont encore pour la Liberté. ne se focaliser que sur le présent est une erreur . n oublions jamais nos racines sans quoi nous serons emportés par le vent de l ’oppression ,comme un arbre sans racines...

merci pour cette date .

Makhno



L’assassinat de Rosa Luxemburg le 15 janvier 1919 - Ne pas oublier !
8 janvier 2009 - 23h05 - Posté par Copas - 83.***.140.***

La mort de Luxembourg et Liebknecht il y a 90 ans ne doit pas nous faire oublier les centaines d’innocents massacrés tous les jours depuis 2 semaines. Faut pas déconner quand même.

A un détail près : Luxembourg et Liebknecht ne furent pas les seuls assassinés et bien d’autres furent découpés à la mitrailleuse lourde, ensuite cela se fit quelques mois après un immense massacre, celui de 14-18, pour les Allemands dans les 2 millions de morts, une Europe ravagée,...

Luxembourg fut une intelligence extraordinaire permettant encore maintenant de mettre à jour les processus de l’impérialisme et du colonialisme, de comprendre les liens entre les batailles démocratiques et des batailles très dures et violentes.

Cette camarade ne vécut pas dans la ouate en dehors des processus violents de la société, bien au contraire.



L’assassinat de Rosa Luxemburg le 15 janvier 1919 - Ne pas oublier !
8 janvier 2009 - 18h34 - Posté par 90.**.208.***

Sans connaître notre histoire nous n’iront nulle part.

Pour une histoire détaillé (in english) de son assassinat :

http://revolutionarydemocracy.org/rdv5n1/luxembrg.htm



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11 décembre 2008 4 11 /12 /décembre /2008 06:19

Une réfexion sur ces concepts à lire sur bellaciao en mai 2008



FRANCE - AFRIQUE

COLONIALISME c’est vieux !

NEOCOLONIALISME c’est quoi !

MPERIALISME c’est langue de bois !

Un certain nombre de faits venant à l’appui de telle ou telle idée avancée ne sont pas relatés mais au-delà de cette insuffisance l’objet de ce propos de débroussaillage est de distinguer en quoi la France - en tant qu’ Etat soutenant les grandes entreprises transnationales françaises - relève de l’impérialisme ou du colonialisme ou du néocolonialisme. Il y a matière à débats. Qu’il y ait impérialisme n’oblige pas à néocolonialisme. Néocolonialisme : c’est quoi ?

1 - INDEPENDANCES AU PLAN POLITIQUE MAIS QUID DE L’ECONOMIQUE ?

En Afrique les principaux Etats colonisés gagnent leur indépendance (sauf les DOM TOM) au début de la V ème République jusqu’en 75 Comores et 77 (Djibouti) ce qui marque aussi la fin du colonialisme au sens strict mais pas de l’impérialisme . Au plan économique les entreprises françaises ont continuées de s’implanter et d’exploiter les ressources terrestres et marines ainsi que la force de travail locale payée à très bon marché. La puissance économique française en Afrique quoique de niveau moindre que celui des USA en Amérique latine fait bien de la France un pays impérialiste de second niveau. Mais le vecteur économique ne suffit pas à l’Etat français pour asseoir sa domination impériale.

2 - LE POLITIQUE SOUS CONTROLE : LE NEOCOLONIALISME FAIT DONC SUITE AU COLONIALISME "CLASSIQUE".

Il se manifeste sur les plans financiers, militaires, et politique. Au plan financier la zone franc s’est maintenue et la monnaie est restée le CFA . En fait ce qui était transféré c’était « la quincaillerie de la souveraineté ; drapeau, hymnes, titres » ( ) mais pas la monnaie toujours issue du Trésor public de la métropole française . Les indépendances politiques furent relative car des accords d’implantation de bases militaires permirent dans de nombreux pays de maintenir des forces française en Afrique.

Par ailleurs, au niveau politique, l’Etat français s’est employé à contrôler de près les gouvernements par des réseaux soutenus au plus haut niveau de l’Etat français. Jacques FOCCARD est resté pendant 14 ans le Secrétaire général à la Présidence de la République pour les affaires africaines et malgaches. Il était aidé par des "coopérants techniques".

En cas de besoin l’Etat français n’a pas hésité à user de l’intervention militaire directe. Les parachutistes ont sauté sur plusieurs capitales africaines. Enfin les différents dictateurs qui devaient assurer le "sale boulot " de l’impérialisme français étaient très honorés par l’Etat français lors de visites. De droite comme de gauche la complicité "fraternelle" a jouée au profit des riches dirigeants africains et contre leurs peuples acculés à la misère et à la pauvreté. C’est à ce prix que la bourgeoisie française à maintenue son empire en Afrique.

3 - IMPERIALISME : CACHER LE MOT OU CACHER LE FAIT QUE LA DOMINATION FAIT SYSTEME

Le mot apparaît sous la Monarchie de Juillet pour désigner les partisans du bonapartisme et du régime politique impérial. Le terme est valorisé. C’est la guerre des Boers (1899-1902) qui va dévaloriser la notion entendue comme nationalisme arrogant des britannique et plus généralement comme politique d’expansion hors d’une métropole. La notion qui deviendra concept avec l’ouvrage de John Hobson. Les communistes vont rattacher l’impérialisme au capitalisme. Le petit livre "L’impérialisme, stade suprême de capitalisme" de Lénine va connaître une grande diffusion de par le monde. Cette large diffusion explique la prudence des scientifiques à utiliser le terme. L’impérialisme en sens large signifie domination sous de multiples formes qui ne se ramènent pas à la domination économique et financière.(cf Les impérialismes en Que sais-je?)

4 - SPECIFICITE 1 : L’AFRIQUE DURABLEMENT PARTAGEE ENTRE PUISSANCES IMPERIALISTE.

L’ensemble du continent africain va subir une colonisation dure et durable de la "vieille Europe", soit la Belgique, la France, la Grande Bretagne, l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne le Portugal. Ses peuples vont être durement exploités et ses ressources pillées. Cela va marquer durablement les consciences. Notamment en matière de migrations et de négrophobie.

5 - ET LA REPUBLIQUE SOCIALE ?

"L’histoire de la France républicaine est malheureusement unilatérale sur la question coloniale. On y trouve aucun point d’appui qui la distinguerait en positif des régimes d’autres puissances coloniales" écrivent Alain MATHIEU et Alain FARDJI (1) .Il faudra attendre la révolution bolchevique dans l’empire tsariste et la fondation des la III Internationale, pour trouver une claire conscience anticolonialiste dans le mouvement ouvrier. Ce qui n’empêcha pas le développement du colonialisme sous couvert de l’universalisme des Lumières apportées aux peuples indigènes. Même sous le Front populaire le consensus colonial ne fut pas brisé. Aujourd’hui encore il est plus facile de lutter contre l’impérialisme américain à l’offensive en Asie ou en Amérique latine et centrale que contre la France qui est le dernier pays au monde à posséder encore des colonies.

6 - LE RENOUVELLEMENT- RENFORCEMENT DE L’IMPERIALISME

La période des accords de Lomé s’achève et l’impérialisme français et européen se renforce via les Accords de partenariats économique (APE) créant un libre échange sans compensation, les retours juteux de l’Aide publique au développement (APD), la dette qui ne cesse d’être une bonne affaire pour la bourgeoisie du Nord. Quelques contributions au Manifeste d’ATTAC développe ces points. Lire aussi ci-dessous un extrait de Claude QUEMAR du CADTM

Sur la situation actuelle lire :

Le communiqué ATTAC Confédération paysanne. Les révoltes de la faim dans les pays du Sud : l’aboutissement logique de choix économiques et politiques désastreux

http://www.france.attac.org/spip.php?article8399

Plateforme dette odieuse

http://www.dette2000.org

Les accords bilatéraux entre l’Europe et le reste du monde : Attention, danger !

http://www.france.attac.org/spip.php?article7103

Comprendre et se mobiliser contre les APE

http://www.france.attac.org/spip.php?article7421

La finance contre-productive http://www.france.attac.org/spip.php?article8398

7 – SPECIFICITE 2 : L’AFRIQUE DANS LE SUD

La vision d’un Sud subissant l’impérialisme du Nord est certes une image simplifiée mais dit toujours une partie de la vérité. Le schéma d’inégalité des richesses dit de "la coupe de champagne" : le haut de la coupe correspondant au Nord, le "pied" au Sud est toujours valide. Evidemment on ne saurait en rester là . Mais s’agissant des pays ACP l’écart richesses/ pauvreté est immense. Pourtant si les africains meurent de faim en grand nombre leur territoire est riche. Le pillage sous des formes diverses explique l’écart (voir les autres liens)

Au sein du tiers-monde - que l’on nomme Sud depuis la chute du Mur de Berlin - l’Afrique et les pays ACP figurent parmi les pays les plus pauvres de la planète. Ils sont nommés différemment selon les instances internationales mais peu importe : PTTE ou PMA. Ce qui a été souligne c’est la différence dans le degré d’aboutissement de la domination subie entre l’Afrique et l’Amérique latine ou d’autres pays dominés par la Triade. Le développement inégal et combiné du capitalisme en Amérique latine produit de très fortes inégalités sociales et territoriales et de nombreuses personnes vivent dans la misère tant en campagne que dans les bidonvilles peri-urbains. On ne saurait oublier cela lorsque l’on veut mettre l’accent sur la grande pauvreté en Afrique. D’ailleurs, la pauvreté existe aussi au nord, en Europe comme aux USA. Elle est destinée à s’accroître avec le démantèlement des formes sociale-keynésienne de l’Etat . Par ailleurs il y a aussi des zones riches en Afrique. Mais il est vrai que le sous-développement est plus massif dans ce continent.

L’histoire de l’Afrique francophone, anglophone et arabophone montre au-delà de la langue une diversité de colonisation et d’impérialisme. Les pays de la vieille Europe autrement dit les plus anciennes puissances colonisatrices (Grande Bretagne, Belgique, France, Allemagne) continuent d’agir pour maintenir la domination. Les indépendances ont accrues la place et le rôle des bourgeoisies locales compradores qui se sont formée ou consolidées (pour celles qui vivaient déjà avec les colons ) comme relai du capital impérial . Ces bourgeoisies compradores assurent durement la domination sur les peuples, plus composés en Afrique de paysans que de salariés, notemment en instrumentalisant les différences ethniques. Le fait de l’instrumentalisation plus que le conflit réel entre ethnies a bien été souligné par Nestor Bionadanure lors du CA d’ATTAC du 19 avril 2008 mais le temps a manqué pour aller plus loin dans les détails de ces dominations. L’accent a été mis sur les résistances qui émergent. Mais là aussi le temps a manqué sur le contenu et la portée de ces résistances. Pour en finir avec l’impérialisme en Afrique la solidarité des altermondialistes avec les résistances populaires est et sera essentiel.

Christian DELARUE ATTAC France

1) Le texte « Colonialisme et post colonialisme français : le plafond de verre » par Alain MATHIEU et Alain FARDJI fournit les données factuelles qui manquent ici.

L’annulation de la dette est-elle possible et souhaitable? Court extrait de conférence de Claude QUEMAR Président du CADTM Oui si l’on considère que cela a été fait pour Cuba (à la demande des USA !) et de l’Allemagne. Oui si l’on considère l’équation suivante : 1 - 7 = 4. ( 1= somme empruntée ; 7= montant déjà remboursé ; 4 = montant restant à assurer... Oui si l’on considère que :
sur une aide de 53 Milliards d’aide publique au développement seulement 15 % arrivent aux pays du Sud... A noter que dans cette aide publique au développement, on compte le montant des dégrèvements d’impôts dont les Français bénéficient pour " dons aux Associations et ONG ! L’Espagne se propose elle aussi d’inclure dans son APD le montant des réduction d’impôt pour don aux ONG ! Il faut également en déduire ce qui ne transite jamais vers les pays du Sud, le montant des intérêts de la dette... ! Le " virement informatique " effectué n’atteint jamais la somme de 53 Milliards d’aide publique déclarée !


De : Christian DELARUE
samedi 3 mai 2008
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6 novembre 2008 4 06 /11 /novembre /2008 20:03
Pour consulter le blog:


Peut-on partager l'ensemble des affirmations du texte? C'est en discussion. Au moins ce texte pose-t-il la question de la démocratie. Merci de réagir


Michel Maugis sur agoravox

Les démocrates sont légion. Il n´y a que cela. Lisez les professions de foi politiques et vous n´y verrez jamais une personne se déclarant opposée à la démocratie ou être partisane d´un régime politique différent comme la monarchie absolue, la dictature fasciste ou autre autoritarisme. Pourquoi insistent-ils donc tant à faire savoir qu´ils en sont, dans un monde où personne ne prétend ne pas l´être ? Qu´insinuent-ils donc ces démocrates apparemment futilement vantards ? 

Il doit y avoir une intention idéologique occulte ou inconsciente pour qu´ils se présentent devant les électeurs par une appellation qu´ils se gardent de définir explicitement, sinon en négatif par opposition aux autres régimes politiques cités précédemment. Pour eux, sans doute, l´étymologie grecque parle d´elle-même. Ce qui ne manque pas d´intérêt lorsqu´on sait qu´en Attique, là où la démocratie fut inventée, 80 % de la population ne faisait pas partie du peuple. Ce n´étaient que des esclaves, des femmes et des métèques. La liberté d´expression n´existait que pour ce reste de 20 % appelé citoyen et formait le "demos", de même pour la liberté et les droits de l´homme de l´époque. Est-ce donc cela leur modèle de démocratie dont ils se vantent être partisans ?
 
Ces démocrates modernes penseraient donc dans leur for intérieur qu´il doit en être toujours ainsi, pour ceux qui se sentent ou sont privilégiés par le régime politique démocratique. Et d´obtenir à travers des élections les gouvernants ad hoc qui sauront maintenir les privilèges de se sentir des démocrates car exerçant le pouvoir à travers ces représentants. Bien sûr, maintenant l´exclusion n´est plus une question de discrimination explicite de la population, mais de l´usage efficace des outils démocratiques modernes, comme les idéologies manipulatrices, de la liberté d´expression sélective, d´une multitude de partis démocratiques, de leurs financements et des embûches légales de toutes sortes. Ces instruments permettent de mettre au pouvoir essentiellement des démocrates ad hoc, choisis par les partis et présentés au bon peuple manipulé pour qu´il choisisse parmi eux les démocrates officiels et de l´opposition, aux officiels naturellement, pas à la démocratie.
 
Dans les deux cas, antique ou moderne, le mode de production, esclavagiste ou capitaliste, est toujours un mode d´exploitation du travail humain au profit d´une classe sélecte de démocrates : ceux qui exercent le pouvoir (au nom) du peuple et qui, on les comprend, trouvent enviable la démocratie qui permet de s´auto-perpétuer par l´alternance dite démocratique bien huilée après plus d´une centaine d´années de bavures et de révoltes sanglantes de non-démocrates qui ne savent pas comment heureux ils sont de vivre en démocratie, qu´ils acceptent pourtant.
 
Les démocrates induisent donc dans l´esprit des électeurs l´idée qu´ils vivent déjà en démocratie et qu´il ne faut donc rien changer de ses formes apparentes actuelles sous peine de perdre ce grand privilège. Et comme les formes de notre démocratie sont celles qui permettent le pouvoir de la classe bourgeoise sur le reste du peuple, c´est une manière de les forcer à penser que le capitalisme et la démocratie, c´est la même chose. Comme d´ailleurs était la même chose démocratie antique et l´esclavagisme, puisque ces démocrates modernes se complaisent à dire que la démocratie date de cette époque, sous d´autres formes, mais avec le même fond d´exclusion de ceux qui n´ont pas la liberté d´en profiter.
 
Qu´ont-ils donc de si particulier ceux qui se disent démocrates, à tout propos, pour toute pensée politique et qui les distinguerait des autres ? Il suffit de connaître la pensée politique de ces autres. De qui ? De ceux qui n´éprouvent pas le besoin d´insister sur l´évidence, pour vivre justement en démocratie qu´ils osent qualifier, eux, de bourgeoise. Qu´ils ne trouvent justement pas assez démocratique et qui luttent pour un monde meilleur dans lequel le peuple pourra librement vivre en paix et avoir la garantie de pouvoir se nourrir, s´abriter, s´éduquer, se soigner et se divertir dans la justice sociale et en accord avec le niveau de développement et ressources de leur société.
 
La réponse est simple ! C´est pour se donner bonne conscience devant la société capitaliste actuelle qu´ils jugent à juste titre injuste, mais dont ils veulent assurer la pérennité en maintenant la propriété privée des moyens de production, en raison de leur égoïsme refoulé. Car c´est justement cette injustice qui leur permet d´être parmi les privilégiés. Alors ils ne se disent pas partisans du capitalisme, mais partisans du démocratisme en feignant de croire que démocratisme et capitalisme sont la même chose. Car le mot en soi est bien plus sympathique que capitalisme.
 
La substitution euphémistique a une base objective. On entend généralement par "démocrate" le partisan d´un système de gouvernance que l´on désigne par "démocratie" et non celui qui gouverne. Ce régime politique dont tout le monde accepte la signification étymologique a pris naissance sous sa forme moderne avec l´apparition de la dominance du mode de production capitaliste au cours du XVIIIe siècle et la prise conséquente du pouvoir politique par la bourgeoisie.

Cette signification du mot démocrate est devenue étymologiquement fausse et trompeuse au fur et à mesure que la bourgeoisie cessa de représenter légitimement les intérêts du peuple tout entier comme c´était le cas sous l´ancien régime. Elle ne sert les intérêts que de ceux qui considèrent en être les bénéficiaires au point de croire qu´ils exercent effectivement le pouvoir et sont donc des démocrates. Car c´est bien ce que signifie le mot démocrate : Celui qui exerce le pouvoir du peuple (au nom du peuple) sans la précision Lincolnienne du "pour le peuple."
 
Le démocratisme ou la démocratie est un régime politique et n´est pas un mode de production. Il y a une volonté consciente des démocrates de confondre ces deux catégories parfaitement distinctes. De confondre le politique et l´économique afin de rester au niveau politique et maintenir le mode de production capitaliste en crise. Il existe depuis 1917 des démocraties socialistes ou populaires, comme Cuba, la Chine, le Vietnam, la RPDC… qui ne sont pas des démocraties bourgeoises.
 
Aristocrate, bureaucrate, technocrate, ploutocrate, gérontocrate, théocrate, phallocrate… c´est clair que le suffixe "crate" imprime un sens péjoratif, confirmé par le caractère dépréciatif qu´inspirent ces quelques mots de la liste desquels, curieusement, Wikipédia exclu "démocrate", pourtant de loin le plus utilisé, mais peut-être parce qu´il n´est pas encore suffisamment déprécié. De se trouver en telle compagnie devrait être désolant et troublant pour ceux qui insistent à se présenter comme démocrates, mais très satisfaisant pour les autres : les démocratistes.
 
Les démocrates ne sont que ceux qui exercent effectivement le pouvoir (au nom) du peuple. L´aristocrate est bien le membre de la classe des nobles (aristocratie) qui exercent effectivement le pouvoir, et non le partisan de la royauté. De même, le bureaucrate est bien celui qui de son bureau exerce un pouvoir et non celui qui est partisan de la bureaucratie. Et ainsi de suite…
 
Il est évident que l´aspect péjoratif du suffixe provient de sa signification "pouvoir" qui a toujours été méprisé ostensiblement ou en sourdine par le peuple qui le subit. Cette terminaison ne peut en aucun cas signifier "être partisan de", il n´y a d´ailleurs aucun autre exemple avec cette signification d´acceptation ou d´adhésion.
 
Les démocrates méritent plus que jamais cette auto-qualification péjorative. S´ils sont des véritables partisans du "pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple", alors ils doivent se nommer démocratistes, en conformité avec la définition de Lincoln. Le terme démocrate restant réservé pour nommer ceux qui exercent effectivement le pouvoir au nom du peuple, mais pour le peuple en son entier et non pour eux exclusivement.
 
Les démocrates ont le but inavoué, conscient ou non, de mieux justifier l´indéfendable, c´est-à-dire la pérennité de l´exploitation de l´homme par l´homme, en critiquant le capitalisme pour l´améliorer, mais en rejetant tout autre solution à sa crise qui relèverait de son dépassement dialectique tel que prévu par l´analyse marxiste de l´Histoire (matérialisme historique). Ils ne défendent plus le capitalisme ; ils défendent la démocratie, c´est-à-dire par insinuation : le capitalisme.
 
Pour ces "petits-bourgeois" démocrates la tentation est irrésistible de rechercher des solutions à la crise du capitalisme sans remettre en cause celui-ci car cela ferait d´eux des marxistes. Quelle horreur ! Comment dépasser le capitalisme sans être révolutionnaire ? Voilà le grand dilemme des démocrates qui ne font depuis quelques temps que proposer des "améliorations" sans jamais évoquer la question cruciale de la propriété des grands moyens de production de distribution et de financement. Celle-ci devrait passer dans les mains de la nation pour que la démocratie qu´ils revendiquent ait aussi le pouvoir économique, le véritable pouvoir.
 
Comme si le mode de production capitaliste était pérenne, que la Révolution socialiste ne pouvait se produire, et que le matérialisme historique qui la prévoit en réponse dialectique aux contradictions avait été réfuté. Par qui ? Oú ? Et quand ?
  Un "démocratiste" milite pour le remplacement révolutionnaire du capitalisme comme mode de production dominant. Il est partisan de la seule et véritable démocratie, celle du pouvoir du peuple, pour le peuple et par le peuple, celle qui permettra dans ce siècle d´installer le socialisme dans les puissances occidentales, le socialisme du XXIe.  
Cette démocratie véritable ne pourra être vue que comme une dictature du prolétariat de la même manière que la démocratie bourgeoise n´est en fait que la dictature de la bourgeoisie, au sens des catégories marxistes : dictature et classes sociales. Dictature du prolétariat ne signifie pas élimination de la bourgeoisie, elle signifie le symétrique de la dictature de la bourgeoisie, c´est-à-dire que ce sera le prolétariat qui dirigera l´économie dans les faits. De toute façon cette classe haute bourgeoise se réduit de plus en plus en nombre d´individus au fur et à mesure que sa part relative du capital privé croît.
 
La démocratie n´est pas contradictoire avec la dictature d´une classe sur une autre, car c´est la dictature démocratique d´une classe en opposition au totalitarisme de cette classe, qui sous le mode de production capitaliste est le fascisme et sous le mode socialiste a été le stalinisme. La différence est que la classe des prolétaires est bien plus nombreuse que la bourgeoise.
 
Il est significatif qu´au cours du siècle passé et même celui-ci, des dictatures bourgeoises fascistes et non démocratiques aient apparu lorsque la bourgeoisie perdait partiellement le pouvoir politique au cours d´élections parfaitement démocratiques. Et que des mouvements fascistes apparaissent en Equateur, Bolivie, Nicaragua, Venezuela, là où justement des peuples reprennent en main leurs ressources et une bonne part du capital étranger… en toute démocratie bourgeoise quoi qu´en disent ces mouvements violents.
 
Le démocrate ne serait-t-il que peu démocratiste et deviendrait facilement fasciste dès que ses privilèges sont en danger ?
 
Le suffixe grec "crate" signifie pouvoir comme nos démocrates ne le savent que trop bien. Car ils l´aiment bien le pouvoir, le leur à ne pas en douter, mais certainement pas celui des prolétaires, c´est-à-dire de ceux qui ne possèdent pour toute richesse que leurs enfants (proliférer), et qui forment pourtant l´immense majorité et sont donc le peuple. Celui-ci se distingue de l´élite possédante (bourgeoise) qui gouverne pour elle-même dans nos démocraties que l´on qualifiera de bourgeoises, mais que les bourgeois ne qualifieront jamais : c´est leur démocratie à eux, et il serait vraiment dangereux de laisser croire au peuple qu´une démocratie pourrait être autre que bourgeoise en la qualifiant comme telle.
 
Je précise de suite, pour les bourgeois en recherche permanente de réfutations par des "raisonnements" en boucle sur l´Histoire décrite et analysée par eux-mêmes, que l´on entend par richesse les moyens qui permettent de s´enrichir. De s´enrichir encore et encore plus par l´appropriation du travail des autres grâce à un capital initial, que celui-ci ait été obtenu par héritage, par le vol ou le pillage et jamais plus par sa propre force de travail.
 
Pour les démocrates, les catégories marxistes ne valent rien, puisqu´elles sont marxistes et servent à expliquer rationnellement les contradictions antagonistes de classes et dont ils ne veulent pas entendre parler. Ils feront n´importent quelles circonvolutions rhétoriques pour éviter d´utiliser pertinemment les définitions marxistes afin de mieux en dévoyer leurs sens. "On sait ce que cela a donné", diront-ils en chœur dans le meilleur des cas à ceux qui osent blasphémer. Et dans les autres, de vous jeter à la face du Pol Pot, du 100 000 000 de morts, du goulag et autres affirmations plus idiotes que tautologiques. Les démocrates ont des raisonnements implacables et n´usent jamais de la langue de bois. Ils usent et abusent des clichés imposés par centaines d´années de propagandes anticommunistes, qui ne sont en fait que de la rhétorique trompeuse acceptée comme joker justifiant l´égoïsme refoulé de gens qui se sentent privilégiés sous le capitalisme occidental.
 
La pensée marxiste motivée par une éthique, celle de la justice sociale, est le véritable semeur de conscience qu´ils redoutent, comme le Vatican qui y voit à juste titre une conception globale du monde concurrente de la sienne, très sérieuse, scientifique, bâtie sur la connaissance accumulée et non sur l´ignorance crasse.
 
Les démocrates (ceux qui se targuent d´en être) sont donc des petits-bourgeois qui ne pensent que pour la pérennité du capitalisme dont ils essaient à coups de rhétoriques hypocrites de substituer l´appellation à celle de "démocratie", mais sans le dire explicitement afin qu´elle paraisse naturelle, comme venant de soi. Encore quelques années, quelques guerres "pour la démocratie" et la substitution sera entrée dans les esprits, sanctifiée en quelque sorte, et ceux qui s´y opposeront seront des blasphémateurs, des révisionnistes, voire des négationnistes puis des "suppôts des terroristes" qu´il faudra enfermer dans des goulags, pardon, des Guantanamos…
 
Dès lors, quiconque propose la nationalisation des grands moyens de production, de financement et de distribution comme solution à la crise, ne peut être un démocrate car minant le principe du capitalisme, c´est-à-dire de la démocratie (bourgeoise cela va de soi).
 
Pourvu que cela dure ! Voilà leur doctrine en mal de conscience ; c´est ce qui ressort en lisant leurs tentatives vaines de s´en donner une bonne, tant ils font preuve d´un antimarxisme patent en évitant ostensiblement de s´y référer, mais, au mieux inconsciemment, pour sauver le capitalisme d´un effondrement bien réel qui ne peut qu´aboutir à son maintien par un système de gouvernement fasciste occidental sur le reste du monde, par la guerre impériale occidentale dirigée par les Etats-Unis.
 
"Socialisme ou barbarie", disait déjà Rosa Luxemburg. Puisque assassinée par la bourgeoisie de son époque après la première guerre impérialiste capitaliste bourgeoise, elle n´a pas connu la barbarie qu´elle pronostiqua et qui ne fut rien d´autre que le fascisme qui s’ensuivit et qui visait, impulsé par la haute bourgeoisie française et anglo-saxonne, le socialisme naissant et dur à cuire en URSS qui venait de résister à la guerre civile. Le fascisme occidental s´installait pour éviter la solution socialiste des Spartakistes à la première grande crise capitaliste et pour renverser l´URSS. Ce que comprirent Staline et les communistes de l´internationale qui s´alignèrent sur Staline pour la survie de l´URSS…
 
Le fascisme est un système de gouvernement capitaliste, comme nos démocrates oublient systématiquement de le préciser. Ils préfèrent l´appeler système totalitaire pour y englober dans l´opprobre le socialisme qui pour eux ne peut qu´être totalitaire par nature, pas comme le capitalisme.
 
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2 novembre 2008 7 02 /11 /novembre /2008 09:07

Sur le net. Sur le site du journal El Bayane

Le 24 juin 2007, les gouverneurs des banques centrales ont assisté à l’Assemblée générale de la Banque des règlements internationaux dont le siège social est à Bâle. Le directeur général de la banque, en présentant son rapport d’exercice, a émis l’idée que l’économie mondiale, depuis 10 ans, traversait un âge d’or grâce à la mondialisation financière. Six mois plus tard, en janvier 2008, éclatait la très grave crise financière que nous connaissons aujourd’hui et que d’aucuns n’hésitent pas à comparer à celle de 1929. Les économistes attribuent cette crise au marché hypothécaire américain.

Il est vrai que depuis la chute du mur de Berlin en 1989, personne n’accorde de crédit aux théories de Karl Marx. Pourtant, la disparition du camp socialiste célébrée par tout le monde a laissé le capitalisme en tête-à-tête avec ses démons intérieurs. Ceux-ci ont trait à la baisse tendancielle du taux de profit dans le système capitaliste. Cette loi, découverte intuitivement par David Ricardo, a été explicitée par Karl Marx ; d’où la nécessité de rappeler ce qu’est cette loi tendancielle de la baisse du taux de profit.
Karl Marx (1818-1883) a publié de son vivant le premier tome de son maître livre «Le Capital» ; les deux volumes suivants demeurent inachevés et ont été publiés en l’état par son ami Friedrich Engels.
Dans le premier tome, Karl Marx va illustrer la loi de Ricardo de la manière suivante : le capital est divisé en deux parties, le capital fixe et le capital circulant. Le capital fixe est formé des biens d’équipement et des matières premières. Ce capital ne produit pas de plus-value ou de valeur ajoutée ou de marge bénéficiaire, les trois mots étant synonymes. Le capital circulant est formé principalement des salaires des cadres et des ouvriers. Ce capital permet la fabrication de produits et par cette action dégage la marge bénéficiaire.
Selon Marx, plus est grand le montant du capital circulant et plus est grande la marge bénéficiaire. Mais le progrès technique oblige l’entrepreneur à investir constamment dans de nouvelles machines relevant du capital fixe ou capital mort. Les nouvelles machines ont besoin de moins en moins de salariés pour produire. Cette réduction de salariés réduit le capital circulant et réduit la marge bénéficiaire. C’est ainsi que de nos jours, des chefs d’entreprise annoncent à la presse des bénéfices records mais, en même temps, des plans sociaux visant à des réductions du personnel.
De la sorte, se produit un plan diabolique : l’entreprise est condamnée au renouvellement de ses machines qui conduit à l’amenuisement des bénéfices. Le capitalisme produit sa propre fin. Cette idée était tout à fait banale au 19e siècle puisque Adam Smith l’avait pronostiquée et Ricardo diagnostiquée. Plus proche de nous Joseph Shumpeter (1883-1950) l’avait validée.
Pour arrêter cette machine diabolique, les entrepreneurs ont pratiqué divers expédients. Le premier expédient a été trouvé dans les colonies : le prix des matières premières était compressé à l’extrême, ce qui faisait diminuer les produits du capital fixe ou capital mort. Cette méthode a été pratiquée, avec succès, pendant deux siècles ; mais son impact finit par disparaître et le problème de la réduction de la valeur ajoutée ou plus-value est revenu à l’actualité.
De cette nécessité d’augmenter la plus-value nécessaire pour rémunérer le capital, est née la doctrine de l’impérialisme par Rosa Luxembourg. Lénine a repris cette idée et l’a illustré par des exemples. Dans «l’impérialisme, stade suprême du capitalisme», Lénine donne plusieurs exemples notamment celui du Maroc. Tout le monde savait qu’au début du 20e siècle, le Maroc était un pays parfaitement insolvable. Cela n’a pas empêché des consortiums bancaires de lui prêter des sommes importantes en 1904 et en 1910. Lénine s’attarde sur l’emprunt de 1910 : le Maroc a reçu 20% du montant de l’emprunt ; 80% étaient réservés à divers remboursements dont les intérêts et les commissions des banques. Tout le monde savait que le Maroc ne pouvait pas rembourser. Mais le taux d’intérêt appliqué, qui était de 7 %, était plus du double du taux du marché qui était de 3 %. De la sorte, la capacité bénéficiaire du capital était renforcée au détriment de la bonne fin de son remboursement.
En 1910 et 1914, l’ensemble des pays pauvres a contracté des emprunts comparables à celui du Maroc. Les bénéfices réalisés éloignaient la perspective de la baisse tendancielle du taux de profit.
La guerre de 1914-1918 est venue opportunément mettre fin à la crise qui se profilait à l’horizon. Les Etats-Unis avaient formulé le concept de «dettes odieuses» et à ce titre, sous la pression américaine, la France avait abandonné ses créances sur le Maroc en 1918.
Ainsi naquit la technique de l’insolvabilité que nous voyons s’appliquer aujourd’hui aux ménages et non plus aux Etats souverains.
Pour comprendre le rôle de l’insolvabilité dans l’augmentation des marges bénéficiaires des banques, il faut revenir à la Banque des règlements internationaux dont le siège international est à Bâle. Depuis une vingtaine d’années, cette banque édicte des règles de solvabilité qui doivent être respectées par l’ensemble des banques de la planète. Il y a eu en 1988 les ratios Cooke ou Bâle 1. Au fil des ans, ils ont été insuffisants et ont été remplacés en 2004 par le ratio McDonough ou Bâle 2. Celui-ci est entré en vigueur le premier janvier 2007 et les banques ont eu 3 ans pour s’y préparer. Nous n’allons pas rentrer dans les détails techniques mais nous allons souligner deux produits importants de Bâle 2. Le premier produit est l’interdiction faite aux banques de prêter aux Etats souverains. En effet, tout prêt fait à un Etat souverain doit être entièrement provisionné dans les comptes de la banque prêteuse. De la sorte, Bâle 2 enlève aux banques une source importante de rentabilité. Le deuxième produit de Bâle 2 fait la part belle aux banques de détail. Leur activité est privilégiée de préférence aux banques d’affaires.
Grâce à Bâle 2, les banques de détail, pour sauvegarder leurs marges bénéficiaires, se sont engouffrées dans les prêts aux ménages insolvables car les ménages insolvables ressemblent aux Etats insolvables. Ils acceptent des taux d’intérêts élevés très au-dessus des taux du marché. Ces ménages insolvables existent dans tous les pays du monde et la dette insolvable s’élève à ce jour à 3 mille milliards de dollars. Tel est le sens de la crise actuelle.

Par Omar Akalay
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25 mai 2008 7 25 /05 /mai /2008 13:39

Un travail d'analyse - à lire et à discuter

« Réformer le marxisme.
Les débats autour des thèses d’Eduard Bernstein parmi les
socialistes français, 1896-1914 »
par Emmanuel Jousse,
lauréat du Prix de la Fondation Jean-Jaurès 2006
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24 décembre 2007 1 24 /12 /décembre /2007 10:09

L'analyse de lutte ouvrière de la révolution spartakiste. A lire, à discuter


À Berlin, le 29 décembre 1918, une centaine de délégués se réunissaient en congrès pour fonder le KPD, le Parti Communiste d'une Allemagne où quatre années de carnage avaient fini par dresser la majorité du peuple, sous l'uniforme ou non, contre l'Empire, ses généraux, ses hobereaux et tous les profiteurs de guerre.

Depuis le début novembre 1918, les conseils d'ouvriers et de soldats s'étaient multipliés dans les villes grandes et petites ; grèves, assemblées, manifestations se succédaient. Chaque journée apportait aux travailleurs et aux militants son lot de combats, mais il leur manquait une direction reconnue, un parti tel que celui qui, un an auparavant, avait conduit les prolétaires russes à la victoire.

Après que l'été 1918 avait réduit à néant les derniers espoirs de l'état-major allemand, la défaite militaire inévitable s'était transformée en déroute. Epuisés, meurtris, les régiments s'étaient révoltés contre l'inutilité de cette boucherie, contre leurs officiers, contre l'état-major ressenti comme incapable, contre les notables de l'arrière. Soldats et marins s'étaient regroupés en comités, en « conseils », rejoints par les ouvriers des chantiers navals et des ports, puis par ceux des usines, où des grèves avaient éclaté dès l'été. Les conseils s'étaient, début novembre, répandus dans toute l'Allemagne. Devant le déferlement de la révolution, la bourgeoisie, le haut commandement militaire, durent prendre des mesures d'urgence. Le 10 novembre, l'empereur dut abdiquer et le 11 novembre l'état-major conclut l'armistice avec la France et les autres États de l'Entente.

La social-démocratie au secours de la bourgeoisie

La guerre était terminée, mais la bourgeoisie devait maintenant faire face, sur le front intérieur, à des masses populaires en révolte. Les éléments les plus conscients des classes possédantes allaient placer leurs espoirs dans les dirigeants de la social-démocratie. « J'ai proposé à Hindenburg que le haut commandement s'allie aux socialistes majoritaires, puisqu'il n'y avait pas alors d'autre parti qui eût assez d'influence sur les masses pour rétablir un pouvoir gouvernemental avec l'aide de l'armée », allait expliquer plus tard le général Groener, chef du Haut état-major.

Le SPD, le Parti social-démocrate d'Allemagne, s'était déjà clairement rangé, en août 1914, aux côtés de la bourgeoisie, soutenant l'effort de guerre et rejoignant l'union sacrée, comme presque tous les autres partis socialistes d'Europe.

Le président du SPD, Friedrich Ebert, fut donc nommé chancelier... la veille même de l'abdication du Kaiser. La république fut proclamée. Un gouvernement baptisé « Conseil des commissaires du peuple  » fut formé, comprenant, avec Ebert, deux autres ministres « commissaires » du SPD, Scheidemann et Landsberg, et trois de l'USPD, le parti des « Indépendants », une scission du Parti social-démocrate.

La dénomination voulait rappeler la révolution russe, mais ce Conseil ne toucha en rien aux organes de l'État, à la haute administration. Au contraire, il s'employa à restaurer une force armée capable de s'opposer aux grévistes et aux manifestants. Le général Groener était en liaison permanente avec Ebert par une ligne téléphonique secrète, assurant celui-ci de son soutien vigilant. Mais il désespérait encore de pouvoir compter sur des unités non contaminées ou sur des troupes de retour du front. Epuisés, désorientés, plus que jamais hostiles à la guerre et à ceux qui la leur avaient imposée, les soldats ralliaient plutôt, bien souvent, les rangs de la révolution.

La vague révolutionnaire enflait toujours. Des grèves éclatèrent fin novembre dans les mines de Haute-Silésie, puis dans la Ruhr, se heurtant à l'hostilité du gouvernement des « commissaires ». L'inquiétude de la bourgeoisie grandissait.

Le gouvernement Ebert, de son côté, se sentait obligé d'avancer quelques promesses : libertés publiques, journée de huit heures, lois sociales... Mais il était surtout évident qu'il cherchait à gagner du temps face à la révolution, pour rétablir une autorité d'État qui lui permette d'y faire face.

Cependant, dans cette confusion des pouvoirs, tous, amis comme ennemis de la classe ouvrière, continuaient à se réclamer de la bannière socialiste. Il fallait qu'un drapeau soit levé haut et clair, susceptible d'orienter les ouvriers, les chômeurs, les soldats, tous les artisans d'une révolution en marche, et de les aider à distinguer entre ceux qui étaient à leur côté et ceux qui les avaient trahis, et se disposaient à les trahir encore.

De Spartakus au KPD

Il existait depuis bien longtemps une fraction révolutionnaire dans la social-démocratie. Ses pires craintes avaient été confirmées lorsque, le 4 août 1914, les députés du SPD avaient voté les crédits de guerre au nom de l'union sacrée avec la bourgeoisie. Aussitôt, autour de Karl Liebknecht, de Rosa Luxemburg, de Franz Mehring, de Leo Joguiches et de Klara Zetkin, des socialistes révolutionnaires avaient milité contre l'évidente trahison des chefs sociaux-démocrates. Isolés, conspués, sans plus d'accès à la presse du parti, ils s'étaient trouvés également en butte à la répression du pouvoir.

Devenus en 1916 le Groupe Spartakus - du nom de cet esclave révolté qui avait fait trembler Rome -, ils éditèrent leur propre presse, les Lettres de Spartacus. Ils avaient rejoint au printemps 1917 le Parti social-démocrate indépendant (USPD), formé par les parlementaires exclus parce qu'ils n'avaient pas voté de nouveaux crédits de guerre. Les désaccords des dirigeants spartakistes étaient cependant nombreux avec les leaders de l'USPD, dont Rosa Luxemburg, de sa prison, combattait le profond réformisme.

Le déroulement des événements de novembre 1918 accéléra, chez les militants de Spartakus, la détermination de constituer d'urgence un parti qui défende sans ambiguïté les intérêts du prolétariat allemand et de la révolution mondiale.

Mais pour la majorité des masses ouvrières, des soldats démobilisés, des paysans pauvres, qui aspiraient à une rapide amélioration de leurs conditions de vie, à la réorganisation d'un pays en ruine, c'était malgré tout encore la social-démocratie qui incarnait la révolution de novembre victorieuse. Toute la propagande de l'appareil social-démocrate, de son quotidien Vorwärts en premier lieu, s'attachait à faire apparaître les spartakistes comme les fauteurs de trouble, prompts à crier à la « trahison », agissant comme des « diviseurs » d'une « unité » nécessaire à la consolidation de la révolution.

De plus en plus fréquemment on trouvait dans le Vorwärts ou sur des affiches des mises en garde, voire des appels au meurtre contre les militants spartakistes.

Fin décembre 1918, la fondation du KPD

À la conférence des spartakistes, réunie le 29 décembre 1918, les cent délégués décidèrent presque unanimement de fonder un parti communiste, à l'image de celui des révolutionnaires russes, qui organiserait les prochains combats des prolétaires allemands, le KPD (S), le Parti Communiste d'Allemagne (Ligue Spartakiste).

Le programme proposé était un texte de Rosa Luxemburg publié le 14 décembre précédent, dans la Rote Fahne (le Drapeau Rouge), le quotidien spartakiste, sous le titre Que veut la Ligue Spartakiste. On pouvait y lire : « Le 9 novembre, le prolétariat allemand s'est dressé pour se débarrasser du joug honteux qui l'accablait. Les Hohenzollern furent chassés, des conseils d'ouvriers et de soldats, élus.

Mais les Hohenzollern n'ont jamais été que les gérants de la bourgeoisie impérialiste et des junkers. La bourgeoisie et sa domination de classe, tel est le véritable responsable de la guerre mondiale en Allemagne aussi bien qu'en France, en Russie comme en Angleterre, en Europe comme en Amérique. Ce sont les capitalistes de tous les pays qui ont donné le signal du massacre des peuples. [...]

La guerre mondiale a placé la société devant l'alternative suivante : ou bien maintien du capitalisme, avec de nouvelles guerres et un rapide effondrement dans le chaos et l'anarchie, ou bien abolition de l'exploitation capitaliste. »

Pour y parvenir, il fallait un parti qui regrouperait, à travers ce pays encore peu centralisé, les militants ouvriers les plus déterminés, ceux qui s'étaient, dans les grèves, portés à la tête de leurs camarades, ceux qui ressentaient clairement la trahison des chefs sociaux-démocrates comme ceux qui l'entrevoyaient seulement mais voulaient la victoire de la révolution sociale.

Ce parti, l'alliance de l'état-major et de la social-démocratie allait s'employer à le décapiter avant qu'il n'arrive à gagner la confiance des masses

Deux semaines plus tard, Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg seraient assassinés par des forces de répression du gouvernement « socialiste ».

Viviane LAFONT
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Grève de masse. Rosa Luxemburg

La grève de masse telle que nous la montre la révolution russe est un phénomène si mouvant qu'il reflète en lui toutes les phases de la lutte politique et économique, tous les stades et tous les moments de la révolution. Son champ d'application, sa force d'action, les facteurs de son déclenchement, se transforment continuellement. Elle ouvre soudain à la révolution de vastes perspectives nouvelles au moment où celle-ci semblait engagée dans une impasse. Et elle refuse de fonctionner au moment où l'on croit pouvoir compter sur elle en toute sécurité. Tantôt la vague du mouvement envahit tout l'Empire, tantôt elle se divise en un réseau infini de minces ruisseaux; tantôt elle jaillit du sol comme une source vive, tantôt elle se perd dans la terre. Grèves économiques et politiques, grèves de masse et grèves partielles, grèves de démonstration ou de combat, grèves générales touchant des secteurs particuliers ou des villes entières, luttes revendicatives pacifiques ou batailles de rue, combats de barricades - toutes ces formes de lutte se croisent ou se côtoient, se traversent ou débordent l'une sur l'autre c'est un océan de phénomènes éternellement nouveaux et fluctuants. Et la loi du mouvement de ces phénomènes apparaît clairement elle ne réside pas dans la grève de masse elle-même, dans ses particularités techniques, mais dans le rapport des forces politiques et sociales de la révolution. La grève de masse est simplement la forme prise par la lutte révolutionnaire et tout décalage dans le rapport des forces aux prises, dans le développement du Parti et la division des classes, dans la position de la contre-révolution, tout cela influe immédiatement sur l'action de la grève par mille chemins invisibles et incontrôlables. Cependant l'action de la grève elle-même ne s'arrête pratiquement pas un seul instant. Elle ne fait que revêtir d'autres formes, que modifier son extension, ses effets. Elle est la pulsation vivante de la révolution et en même temps son moteur le plus puissant. En un mot la grève de masse, comme la révolution russe nous en offre le modèle, n'est pas un moyen ingénieux inventé pour renforcer l'effet de la lutte prolétarienne, mais elle est le mouvement même de la masse prolétarienne, la force de manifestation de la lutte prolétarienne au cours de la révolution. A partir de là on peut déduire quelques points de vue généraux qui permettront de juger le problème de la grève de masse..."

 
Publié le 20 février 2009